En ce qui concerne la mini-série sur "Les Misérables"
(1862), je me suis bien sûr servi du roman et des dossiers contenus
dans les différentes éditions. Mais je tiens aussi à remercier tout
particulièrement monsieur Pierre BAUDRIER, historien
travaillant sur le sujet et la période, qui a eu la gentillesse de me
contacter et de m'envoyer beaucoup de documentation scientifique sur
l'Insurrection de 1832, qui m'a permis d'être aussi précis dans le
contexte et les explications.
Blog d'un historien passionné et d'un Français exilé volontaire au Québec. Vous y trouverez donc : des mini-séries historiques passionnantes, des articles bien faits sur ma vie dans la Belle Province, de virulents posts politiques, des hommages aux grand(e)s hommes et femmes qui nous quittent, le tout séparé par des interludes vidéo amusants, ainsi que quelques uns de mes mauvais poèmes et écrits rédigés mes heures perdues. Son blog jumeau sur http://remiposeidon.skyrock.com.
jeudi 5 juillet 2012
Dimanche 17 Juin 2012 : Second tour des 14èmes Élections législatives de la Vème République française.
Oui,
je sais, je suis en retard. On va dire que c'est pour nos amis
canadiens qui n'auraient pas suivi la politique française ce dernier
mois. Et comme de toute façon c'est passé, je ne ferai pas de la réclame
pour pousser les gens à aller voter. Notez qu'au vu de l'abstention,
j'aurais peut-être dû...
I Résultats du premier tour.
Le
premier tour se tenait le Samedi 2 Juin 2012 dans les 11
Circonscriptions de l’Étranger (Amérique du Nord ; Amérique latine ;
Europe du Nord ; Benelux [Royaume de Belgique, Royaume des Pays-Bas,
Grand Duché du Luxembourg]; Péninsule ibérique et Principauté de Monaco ;
Confédération des Cantons suisses ; Europe centrale ; Europe du Sud,
République de Turquie et État hébreu d'Israël ; Afrique du Nord-Ouest ;
Afrique du Centre, Afrique du Sud et Afrique de l'Est ; Europe de l'Est,
Asie, Océanie). Il se tenait le Samedi 9 Juin 2012 dans les
Départements et Territoires d'Outre-Mer (D.O.M.-T.O.M.) et le Dimanche
10 Juin 2012 en France métropolitaine.
Le
décalage d'une semaine des Circonscriptions de l’Étranger s'explique
par le fait que les candidats avaient besoin de deux semaines pour faire
campagne efficacement pour le second tour dans leurs gigantesques
circonscriptions.
J'en
profite pour compléter mon tableau des candidats pour l'Amérique du
Nord, qui étaient 18 et non pas 14, j'ai appris l'existence des quatre
derniers lors de la publication des résultats. Ils n'ont pu faire
campagne jusqu'à Québec faute de moyens (ils ont fait 0,00% à Québec).
Il s'agissait de quatre Indépendants : Jean-Michel VERNOCHET, Rob
TEMÈME, Louis le GUYADER et Mike REMONDEAU. Mes plus plates excuses pour
ne pas les avoir inclus dans mon premier article.
Voici les résultats nationaux du premier tour.
Abstention: 42,78% (très forte...) des citoyens inscrits sur les listes électorales.
Votants: 57,22% des citoyens inscrits sur les listes électorales.
Votes blancs et nuls: 1,58% des votants.
Suffrages exprimés: 98,42% des votants.
Majorité présidentielle de Gauche: 39,86% des suffrages exprimés, 25 candidats élus dès le premier tour.
_Parti Socialiste (P.S.): 29,35% des suffrages exprimés, 22 candidats élus dès le premier tour.
_Europe Écologie - Les Verts (E.E.-L.V.): 5,46% des suffrages exprimés, un candidat élu dès le premier tour.
_Parti Radical de Gauche (P.R.G.): 1,65% des suffrages exprimés, un candidat élu dès le premier tour.
_Divers Gauche (D.V.G.) et Dissidents du Parti Socialiste (P.S.): 3,40% des suffrages exprimés, un candidat élu dès le premier tour.
Opposition de la Droite parlementaire: 34,66% des suffrages exprimés, onze candidats élus dès le premier tour.
_Union pour un Mouvement Populaire (U.M.P.): 27,12% des suffrages exprimés, 9 candidats élus dès le premier tour.
_Divers Droite (D.V.D.) et Dissidents de l'Union pour un Mouvement Populaire (U.M.P.): 3,51% des suffrages exprimés, un candidat élu dès le premier tour.
_Nouveau Centre (N.C.): 2,20% des suffrages exprimés, un candidat élu dès le premier tour.
_Alliance Centriste (A.C.): 0,60% des suffrages exprimés.
_Parti Radical Valoisien (P.R.V.): 1,24% des suffrages exprimés.
Centristes et Indépendants: 2,73% des suffrages exprimés.
_Mouvement Démocrate (MoDem) renommé "Centre pour la France": 1,77% des suffrages exprimés.
_Écologistes indépendants: 0,96% des suffrages exprimés.
Extrême-Gauche: 7,89% des suffrages exprimés.
_Front de Gauche (F.d.G.): 6,91% des suffrages exprimés.
_Autres partis ou candidats d'Extrême-Gauche sans étiquette: 0,98% des suffrages exprimés.
Extrême-Droite: 13,79% des suffrages exprimés.
_Front National (F.N.) rebaptisé "Rassemblement bleu marine pour une Alliance nationale": 13,60% des suffrages exprimés.
_Autres candidats d'Extrême-Droite sans étiquette: 0,19% des suffrages exprimés.
Régionalistes & Indépendantistes (Pays basque, Île de Corse, Départements et Territoires d'Outre-Mer [D.O.M.-T.O.M.]): 0,56% des suffrages exprimés.
Indépendants, Solidarité & Progrès (S&P) et Parti Pirate (P.P.): 0,52% des suffrages exprimés.
À noter que 36 candidats ont réuni 50% des suffrages exprimés au premier tour et ont donc été élus directement.
En Amérique du Nord, 1ère Circonscription des Français de l’Étranger, voici ce que ça a donné.
Abstention:
79,6% (!) des 159.683 inscrits sur les listes électorales consulaires.
Cela s'explique par le désintérêt, le peu de publicité, et surtout un
immense cafouillage technique des votes par courrier ou Internet,
faisant que les votes par correspondance, tant vantés, n'ont finalement
pas été comptabilisés.
Votants: 20,4% des 159.683 inscrits sur les listes électorales consulaires.
Votes blancs et nuls: 1,1% des votants.
Suffrages exprimés: 98,9% des votants.
_Corinne NARASSIGUIN (Parti Socialiste [P.S.] & Europe Écologie- Les Verts [E.E.-L.V.]): 39,65% des suffrages exprimés.
_Frédéric LEFEBVRE (Union pour un Mouvement Populaire [U.M.P.]): 22,08% des suffrages exprimés.
_Émile SERVAN-SCHREIBER (Divers Droite [D.V.D]): 6,69% des suffrages exprimés.
_Julien BALKANY (Dissident U.M.P.): 6,61% des suffrages exprimés.
_Antoine TREUILLE (Divers Droite [D.V.D.]): 5,10% des suffrages exprimés.
_Carole GRANADE (Mouvement Démocrate [MoDem] du Centre pour la France): 4;94% des suffrages exprimés.
_Claire SAVREUX (Front National [F.N.] & Rassemblent bleu marine pour une Alliance nationale): 4,29% des suffrages exprimés.
_Céline CLÉMENT (Front de Gauche [F.d.G.]): 2,85% des suffrages exprimés (dont le mien, mais que voulez-vous... l'Amérique du Nord n'est pas communiste).
_Gérard MICHON (Dissident U.M.P.): 2,23% des suffrages exprimés.
_Philippe MANTEAU (Nouveau Centre [N.C.]): 1,41% des suffrages exprimés.
_Raphaël CLAYETTE (Parti Pirate [P.P.]): 1,29% des suffrages exprimés.
_Christophe NAVEL (Divers Droite [D.V.D.]): 1,28% des suffrages exprimés.
_Stéphanie BOWRING (Parti Radical de Gauche [P.R.G.]): 1,04% des suffrages exprimés.
_Karel VEREYCKEN (Solidarité & Progrès [S&P]): 0,38% des suffrages exprimés.
_Jean-Michel VERNOCHET (Indépendant): 0,05% des suffrages exprimés (17 votants, l'équipe de campagne...).
_Rob TEMÈME (Indépendant): 0,05% des suffrages exprimés (pas mieux...).
_Louis le GUYADER (Indépendant): 0,03% des suffrages exprimés (10 votants, les proches...).
_Mike REMONDEAU (Indépendant): 0,02% des suffrages exprimés (6 votants, la famille proche...).
C'est donc un duel entre la socialiste-écologiste Corinne NARASSIGUIN et le parachuté U.M.P. Frédéric LEFEBVRE qui s'annonce.
II L'entre-deux tours.
Oh, ce fut marqué par quelques couacs amusants.
En France tout d'abord.
Jean-Luc MÉLENCHON (1951- ), meneur du Front de Gauche,
était allé défier Marion Anne Perrine "Marine" LE PEN (1968- ) sur ses
terres à Hénin-Beaumont, zone désindustrialisée du Pas-de-Calais. Ecrasé
au premier tour, il a dû s'effacer devant le candidat socialiste
Philippe KEMEL.
À
La Rochelle, Marie-Ségolène ROYAL (1953- ), ancienne candidate
socialiste à l'élection présidentielle de 2007, parachutée dans la
ville, se trouve confrontée à un adversaire local de gauche, Olivier
FALORNI, qui refuse de se désister.
L'U.M.P.
commence à se déchirer entre les tenants de la Droite parlementaire et
républicaine, les libéraux, et ceux qui veulent aller chercher les
électeurs de l'extrême-droite.
En Amérique ensuite.
La campagne n'intéresse personne ou presque.
Frédéric
LEFEBVRE, alors même que la circonscription a été taillée sur mesure
pour lui en 2010, se trouve en mauvaise posture. En effet, seuls Julien
BALKANY et Gérard MICHON lui apportent leur soutien. Tous les autres
candidats, même de Droite, soutiennent la Socialiste car elle est une
candidate locale, travaillant et vivant à New-York. LEFEBVRE se croit
alors obligé de rappeler que lui aussi est un candidat local. Il a vécu
en Amérique de sa naissance jusqu'à l'âge de 18 mois. Puis, il se livre à
un jeu de désinformation et de mensonge qui le décrédibilise aux yeux
de ceux qui suivent la campagne. Heureusement pour lui, les Français
d'Amérique sont surtout des cadres et des entrepreneurs, donc plutôt à
droite, et surtout ils ne suivent pas l'entre-deux tours, car ça lui
aurait été néfaste.
Le
second tour se tient le Samedi 16 Juin 2012 dans les Circonscriptions
de l’Étranger et dans les Départements et Territoires d'Outre-Mer
(D.O.M.-T.O.M.), le Dimanche 17 Juin 2012 en France métropolitaine, de
8h à 20h.
III Résultats du second tour: composition de la XIVème Législature de la Vème République française.
Le
couperet tombe. Il faut avoir 289 sièges pour disposer de la majorité
absolue dans cette chambre de 577 députés. Les sondeurs estimaient
d'abord que le P.S. aurait peut-être à partager la majorité
avec le Front de Gauche, les Écologistes et leurs alliés de Gauche.
Puis, qu'ils devraient pouvoir atteindre la majorité absolue avec l'aide
des Divers Gauche.
Vers 21h30, Dimanche 17 Juin 2012, les premières estimations sont diffusées.
Abstention:
44,60% des citoyens inscrits sur les listes électorales, encore plus
forte qu'au premier tour, les Français sont tannés de ces élections à
répétition, pensent que la présidentielle suffit ou sont dégoûtés de la
politique actuelle qui ne répond pas à leurs problèmes.
Votants: 55, 40% des citoyens inscrits sur les listes électorales.
Votes blancs et nuls: 3,85% des votants.
Suffrages exprimés: 96,15% des votants
Majorité présidentielle de Gauche: 49,96% des suffrages exprimés, 331 sièges, majorité absolue.
_Parti Socialiste (P.S.): 40,91% des suffrages exprimés, 280 sièges.
_Europe Écologie - Les Verts (E.E.-L.V.): 3,60% des suffrages exprimés, 17 sièges.
_Parti Radical de Gauche (P.R.G.): 2,34% des suffrages exprimés, 12 sièges.
_Divers Gauche (D.V.G.) et Dissidents du Parti Socialiste (P.S.): 3,08% des suffrages exprimés, 22 sièges.
Opposition de la Droite parlementaire: 34,66% des suffrages exprimés, 229 sièges.
_Union pour un Mouvement Populaire (U.M.P.): 37,95% des suffrages exprimés, 194 sièges.
_Divers Droite (D.V.D.) et Dissidents de l'Union pour un Mouvement Populaire (U.M.P.): 1,82% des suffrages exprimés, 15 sièges.
_Nouveau Centre (N.C.): 2,47% des suffrages exprimés, 12 sièges.
_Alliance Centriste (A.C.): 0,53% des suffrages exprimés, 2 sièges.
_Parti Radical Valoisien (P.R.V.): 1,35% des suffrages exprimés, 6 sièges.
Mouvement Démocrate (MoDem) renommé "Centre pour la France": 0,49% des suffrages exprimés, 2 sièges.
Front de Gauche (F.d.G.): 1,08% des suffrages exprimés, 10 sièges.
Extrême-Droite: 3,79% des suffrages exprimés, 3 sièges.
_Front National (F.N.) rebaptisé "Rassemblement bleu marine pour une Alliance nationale": 3,66% des suffrages exprimés, 2 sièges.
_Autres partis ou candidats et d'Extrême-Droite sans étiquette: 0,13% des suffrages exprimés, 1 siège.
Régionalistes & Indépendantistes (Pays basque, Île de Corse, Départements et Territoires d'Outre-Mer [D.O.M.-T.O.M.]): 0,59% des suffrages exprimés, 2 sièges.
Sachant que sur les 22 élus des Divers Gauche,
17 sont des dissidents socialistes ayant été accueillis à bras ouverts
dans le Parti après la victoire, cela donne 297 sièges pour le Parti Socialiste (P.S.) à lui seul, donc une majorité absolue.
Pour la première fois depuis 1993, le Front National (F.N.)
siège à l'Assemblée nationale. Il y avait été porté en 1986, avec 35
sièges, lorsqu'il s'était tenu une élection législative à la
proportionnelle. Les deux élus sont l'avocat Gilbert COLLARD (1949- ),
grande gueule arriviste qui navigue depuis longtemps dans les différents
bords politiques et qui se retrouve bien dans les idées du F.N.,
et Marion MARÉCHAL-LE PEN (1990- ), nièce de Marine, jeune
inexpérimentée de 22 ans pilotée par le grand-père toujours présent,
Jean-Marie LE PEN (1928- ). Et non, Marine LE PEN n'est pas là, battue à
Hénin-Beaumont d'une centaine de voix par le socialiste Philippe KEMEL.
L'autre élu d'extrême-droite défend l'obscur parti nationaliste de la
Ligue du Sud, Jacques BOMPARD (1943- ), actuellement poursuivi en
justice pour corruption et prise illégale d'intérêts... c'est beau la
politique...
L'U.M.P.
a morflé, bien rares sont les membres du gouvernement 2007-2012 à être
réélus députés. Leurs alliés les lâchent. La guerre des chefs peut
commencer pour la direction du parti, avec comme point de départ
remettre un peu d'ordre dans la ligne et les idées. Bon courage, le P.S. a mis 10 ans pour y arriver.
Le
centre disparaît, explosé, écrasé. François BAYROU (1951- ), qui avait
réussi à donner corps et parti à cette idée en 2007, est battu dans son
fief du sud-ouest. Il n'est désormais plus que conseiller municipal
d'opposition à Pau... Le MoDem n'existe plus. La reconstruction viendra peut-être du Parti Radical (P.R.) de Jean-Louis BORLOO (1951- ).
Le P.S.
compte une grande disparue. Ségolène ROYAL s'est fait balayer à La
Rochelle. Elle qui visait la Présidence de l'Assemblée nationale, la
voilà Présidente de la Région Poitou-Charente, pis c'est tout.
Mon
grand regret est la disparition du Front de Gauche, qui revient aux 10
sièges habituels, bien loin des espoirs soulevés par la vague rouge des
présidentielles.
Maintenant,
y'a plus qu'a. On verra bien ce que ça va donner, mais je n'espère pas
grand chose vu la crise actuelle et la carrure de nos politiciens
d'aujourd'hui...
En Amérique du Nord, ça a donné ça.
Abstention: 80,90% des inscrits sur les listes électorales consulaires. Mêmes raisons qu'au premier tour.
Votants: 19,10% des inscrits sur les listes électorales consulaires.
Votes blancs ou nuls: 2,20% des votants.
Suffrages exprimés: 97,80% des votants.
_Corinne NARASSIGUIN (Parti Socialiste [P.S.] & Europe Écologie - Les Verts [E.E.-L.V.]): 54,01% des suffrages exprimés, élue. C'est pas que ça vaut grand chose vue la participation, mais voilà, c'est fait.
_Frédéric LEFEBVRE (Union pour un Mouvement Populaire [U.M.P.]): 45,99% des suffrages exprimés, battu.
À noter que l'U.M.P.
avait taillé les Circonscriptions de l’Étranger pour s'assurer 8 sièges
et en laisser 3 aux Socialistes. C'est le contraire qui s'est produit,
bien fait !
Carte
des résultats par circonscriptions. À noter une erreur sur la carte du
monde: l’Amérique latine n'est pas rose, mais verte, ce sont les
écologistes qui l'ont emporté.
mercredi 4 juillet 2012
Juin 1832-Juin 2012 : 180 ans de l'Insurrection républicaine des "Misérables". Interlude final.
Cette fois-ci, je vous passe une version anglaise de la comédie musicale "Les Misérables" (1985), adaptée de la version française de 1980 par Sir Cameron MACKINTOSH (1946- ). Ici, l'adaptation en chœur de "À la volonté du Peuple" (1980), qui devient "Do you hear the People sing ?" (1985). Les paroles sont aisées à comprendre et elle a de l'allure aussi pour clore cette mini-série. Extrait du Concert du 25ème Anniversaire le 3 Octobre 2010.
Juin 1832-Juin 2012 : 180 ans de l'Insurrection républicaine des "Misérables". 5°) 6 Juin 1832, la répression.
Au
matin du 6 Juin 1832, Louis-Philippe est décidé à en finir. Il passe en
revue les troupes devant le Château des Tuileries avant de les lancer
de nouveau dans la bataille.
C'est
d'abord l'artillerie qui entre en scène vers 7h du matin. Les
redoutables Pièces de 8 des manufactures Gribeauval, qui sont encore
pour deux décennies les meilleurs canons du monde avant que l'allemand
Krupp ne révolutionne à nouveau l’artillerie au désavantage de la
France. Par batteries uniques ou de deux pièces, les canons sont
positionnés face aux barricades. Les premiers tirs à boulet sont sans
effet contre ces monstres mous que sont les barricades. Vers 8h, ordre
est donné de tirer à mitraille. C'est vicieux mais efficace. Les balles
en rafale s'immiscent au travers des protections ou ricochent contre les
murs des maisons dans les rues étroites, blessant ou tuant les insurgés
imprudents qui ne sont pas mis à couvert contre le pavé ou à
l'intérieur des bâtisses. Le pilonnage se poursuit jusqu'à 11h du matin.
Rue
de la Chanverrerie, Enjolras et ses compagnons sont rejoints aux
petites heures de l'aube par Jean VALJEAN. Fichus pour fichus, les
insurgés libèrent de leur devoir cinq hommes. Inutile que quarante
hommes périssent là où trente feraient le même travail. Mais pour passer
sans risque, il leur faut un uniforme de la Garde nationale. Cinq
hommes mais seulement quatre uniformes. Jean VALJEAN offre alors le
sien. Le canon se met en place à l'angle de la Rue Saint-Denis. Gavroche
atteint la barricade au premier coup de canon. Puis, le brutal se met à
tousser à mitraille, fauchant les défenseurs. Pour gagner du temps,
Enjolras couche en joue et abat le jeune Sergent d'Artillerie commandant
la pièce. De son côté, Jean VALJEAN décoiffe au fusil deux observateurs
de la Troupe postés sur un toit, sans les tuer, afin de leur prouver
que le point n'est plus sûr et protéger la barricade des regards
indiscrets.
À 10h, une compagnie de la Garde nationale charge sur la Barricade des Amis de l'ABC.
Quelques salves bien ajustées les massacrent, mais font griller de
précieuses cartouches aux défenseurs. De même, cette attaque improvisée a
été balayée sur ses arrières par le canon, les artilleurs n'ayant point
reçu l'ordre de cesser le feu... Victor HUGO s'inspire en
fait d'une attaque lancée sur la barricade de la Rue Saint-Martin,
emmenée par un fougueux officier de la Garde nationale qui a attaqué
sans ordre, causant la mort d'un grand nombre d'hommes parmi la Troupe.
Vers
10h30, Rue Saint-Denis, le canon ouvre de nouveau le feu au boulet,
visant le haut du mur afin d'y ouvrir une brèche. Le 55ème Régiment de
Ligne avance alors prudemment, faisant feu tous les cinq pas, obligeant
finalement les défenseurs à griller leurs cartouches, puis se replient.
Le moral est bon parmi les insurgés mais les munitions sont au plus bas.
Gavroche s'élance alors dans le brouillard qui suit les fusillades.
Rapidement repéré par les soldats, l'enfant s'amuse à esquiver les tirs
tout en ramassant les cartouches dans les musettes des soldats tombés.
Une balle finit par l'atteindre à la tête, et il s'effondre en chantant
la chanson de l'interlude précédent, fauché à 12 ans par l'Histoire et
ses tumultes. Marius sort chercher Gavroche, suivi par Combeferre qui
ramasse les munitions.
À
11h, les canons face au Quartier Saint-Merri ouvrent de nouveau le feu à
boulet pour ébrécher les barricades en leur sommet. L'assaut final est
imminent. Dernières désertions dans le camp des insurgés.
Au
Cabaret Hucheloup, Jean VALJEAN reconnaît Javert ligoté, le forçat face
au policier, la proie dominant la chasseur. Alors qu'Enjolras veut
l'exécuter, VALJEAN se propose. Javert se prépare à mourir et raille
VALJEAN qui le menace au pistolet et l'emmène Rue Mondétour. Pourtant,
Jean VALJEAN tire en l'air, libère le policier et lui donne même son
adresse. Javert en est fort ennuyé mais ne fait pas de vieux os dans les
parages.
À
12h, l'assaut général est lancé sur ordre du Maréchal Jean-de-Dieu
SOULT (1769-1851), ancien de l'Empire ayant retourné sa veste. Dans le
Quartier Saint-Merri, la Troupe attaque sur trois axes : au nord par la
Rue Saint-Martin, à l'est par la Rue du Cloître Saint-Merri, au sud par
la Rue de la Verrerie. Du côté des Halles, l'assaut est donné depuis la
Rue Saint-Denis en plein dans la Rue de la Chanverrerie. Cliquez pour
agrandir.
Tout
ce que Paris compte de troupes fidèles au Roi se lance dans l'assaut :
Infanterie de Ligne (voir article précédent), Garde nationale (voir
deuxième article), Gendarmerie royale de Paris (ci-dessous en haut) et
même Sapeurs-Pompiers de Paris (ci-dessous en bas) chargés d'élargir la
hache les brèches dans les barricades.
Ci-dessous,
attaque de la barricade Rue Sainte-Catherine en 1848. Les attaques se
font ainsi, en double ligne, au pas de charge, submergeant par le
nombre.
La
Troupe emporte facilement les barricades du Quartier Saint-Merri, à
l'exception de celle de la Rue Saint-Martin, et butte devant le cloître
transformé en redoute. Ce bastion insurgé résiste jusqu'à 13h30 et les
17 survivants seront achevés sans procès à la baïonnette. La
barricade de la Rue de la Chanverrerie subit l'assaut de plein fouet et
s'effondre rapidement. Les insurgés refluent en désordre vers le
Cabaret Hucheloup. Marius, blessé à la tête, s'effondre. Jean VALJEAN
l'attrape et parvient à fuir par la Rue Mondétour où il s'échappe par
les égouts. Les soldats forcent alors la porte du cabaret, Enjolras et
deux survivants parviennent à atteindre l'étage et détruisent
l'escalier, qui est néanmoins escalader par les soldats. Ne reste alors
qu'Enjolras de vivant. Il va être fusillé quand Grantaire, saoul depuis
la veille au soir et qui cuvait sur une table de l'étage, s'éveille et
vient se placer à côté de son ami. Ils sont abattus sur le champ.
À
13h30, tout est fini. La Ligne patrouille en surface, la Garde
nationale dans les égouts. Jean VALJEAN manque d'être pris mais est aidé
à la sortie du Grand Collecteur par Javert.
À
15h30, Jacques LAFFITTE (1767-1844), Hyacinthe Camille Odilon BARROT
(1791-1873) et Dominique François Jean ARAGO (1786-183), signataire du
livret qui a mis le feu aux poudres, se rendent aux Tuileries pour
négocier l'arrêt des combats, et apprennent de la bouche de
Louis-Philippe que tout est terminé.
La
répression peut alors commencer. Dès le 6 Juin 1832, Paris est mis en
état de siège, ce qui autorise les arrestations arbitraires. 200
personnes sont arrêtées, tant dans les milieux républicains que
légalistes (DESCHAPELLES n'échappe pas à l'arrestation et CHATEAUBRIAND
lui-même est inquiété). Louis-Philippe craint néanmoins que les jurys
populaires des cours d'assise ne se montrent trop cléments envers les
Républicains, comme ça a toujours été le cas. Il passe donc au-dessus de
la Charte 1830 (qui a valeur de Constitution) et fait traduire les
accusés devant un Conseil de Guerre le 10 Juin 1832. Ce faisant, il
passe outre l'Article 54 qui stipule "Il ne pourra en conséquence être
créé de commissions et de tribunaux extraordinaires, à quelque titre et
sous quelque dénomination que ce puisse être.". Le peuple gronde à
nouveau. Le 18 Juin, toutes les condamnations sont envoyées en cour de
cassation, qui s'appuie sur la Charte et renvoie tout ce beau monde en
cour d'assise. Louis-Philippe est dépité mais ses craintes ne sont pas
fondées. Les jurys se montrent sévères, peut-être à cause de la présence
de légalistes, et prononcent 82 condamnations (sur 136 accusés) dont 7 à
mort, que le Roi communie en déportation dans les Colonies royales
françaises de Guyane. DESCHAPELLES est libéré. Son coup de force pour
déstabiliser la Monarchie de Juillet a échoué, Charles X perd peu à peu
ses espoirs de revenir au pouvoir en France.
Juin 1832-Juin 2012 : 180 ans de l'Insurrection républicaine des "Misérables". Interlude.
Un extrait de la comédie musicale "Les Misérables"
(1980), plus précisément du concept-album. Paroles de Alain BOUBLIL
(1941- ) et Jean-Marc NATEL sur une musique de Claude-Michel SCHÖNBERG
(1944- ). Cette fois-ci, c'est la célèbre "Chanson de Gavroche" ou "La faute à Voltaire", dont les paroles du refrain reprennent textuellement celles écrites par Victor Marie HUGO (1802-2885) dans le roman "Les Misérables" (1862), les couplets ayant été un peu brodés en 1980... Voix du jeune Fabrice BERNARD.
Juin 1832-Juin 2012 : 180 ans de l'Insurrection républicaine des "Misérables". 4°) Nuit du 5 au 6 Juin 1832, les barricades.
Au
soir du 5 Juin, la situation des insurgés paraît déjà désespéré.
Enserrée entre le Quartier Saint-Merry et le Quartier des Halles, cernée
par la Troupe et une majorité des bataillons de la Garde nationale, la
Révolution de 1832 semble déjà un désastre. Monarchistes légalistes et
Républicains se trouvent alors dans la même panade et unissent leurs
forces pour consolider leurs positions. Les armureries du quartier sont
pillées, mais l'équipement reste maigre. Des fusils à un coup à
tabatière datant des années 1820, quelques pistolets guère plus récents,
des fusils de chasse à deux coups, quelques sabres, et surtout beaucoup
de couteaux et autres ustensiles tranchants détournés de leur usage
premier.
Dans
le crépuscule, des barricades sont élevées. L'art de bâtir une
barricade est décidément la spécialité des Parisiens au XIXème siècle,
et ces ouvrages défensifs ne cesseront de s'améliorer au fil du siècle
pour trouver leur apothéose avec les gigantesques redoutes de la Commune
de Paris en 1871. En 1832, le temps manque pour ériger de grands
obstacles, mais cela suffit à bloquer les rues étroites de Paris. Les
pavés sont arrachés et érigés de façon à bâtir un mur vertical côté
attaquant, empilage irrégulier escaladable côté défenseur. Entre les
pavés sont glissés des sacs de sable et des matelas pour amortir les
coups de canons que l'attaquant viendrait à tirer. Au sommet du mur, un
empilage de planches, de charrettes et d'objets en tout genre sert à
protéger les défenseurs en position de tir et à gêner l'escalade de
l'assaillant. Bien érigée (et pour peu que les défenseurs aient des
réserves suffisantes en munitions), une barricade peut tenir en échec un
grand nombre d'attaquant en étant défendue par relativement peu
d'hommes. En 1848, la Barricade du Boulevard Saint-Antoine, monstruosité
montant jusqu'aux étages des maisons, défendue sur ses arrières par
d'autres barricades plus petites et par 82 hommes seulement, tint en
échec 4.000 hommes pendant trois jours. Les images suivantes datent de
la Révolution française de 1848 mais illustrent bien à quoi pouvaient
ressembler des barricades à l'époque. (Celle sans annotation était
située Rue Saint-Maur).
L'insurrection
se concentre surtout dans le Quartier Saint-Merri. Le Quartier Général
est sis dans le Cloître Saint-Merri (qui existe toujours) et la
barricade-mère défend l'angle nord-ouest de l'édifice en bouclant le
coin de la Rue Saint-Merri et de la Rue Saint-Martin (qui existent
toujours et forment aujourd'hui le sud-ouest de la Place Georges
POMPIDOU et son affreux Centre d'Art contemporain qui jure si mal avec
les maisons voisines). Des barricades sont érigées aux alentours dans le
quartier. Il y a un peu moins de 900 insurgés. Paris les a lâché.
Victor HUGO invente alors un cadre un peu excentré pour son roman. Les Amis de l'ABC
érigent une barricade en face d'un de leurs cafés favoris, le Café de
Corinthe, Rue de la Chanverrerie (aujourd'hui au numéro 102, Rue Rambuteau)
et non Rue Saint-Denis (Victor HUGO cite cette rue car c'était à
l'époque un axe important de la capitale, connu de tout le monde) qui
est un peu à l'est et par où les soldats arriveront. Enjolras et ses
amis tiennent leur quartier général dans le Cabaret Hucheloup, qu'ils
transforment en redoute, sis à l'Angle de la Rue de la Verrerie
(Rambuteau) et de la Rue Mondétour (au numéro 2) qui sert d’échappatoire
car trop étroite pour que la Ligne se risque à attaquer, et surtout
trop sinueuse pour qu'elle soit efficacement gardée. La Rue et le
Passage Mondétour existent toujours et serpentent dans le Quartier des
Halles. Cliquer pour agrandir.
Gavroche,
malgré son jeune âge, prend une part active dans cette révolution qui
s'annonce. Il reconnaît alors l'inspecteur Javert, mêlé aux insurgés, à
qui il a déjà eu affaire et en averti Enjolras. Se sachant reconnu,
Javert ne résiste pas et se retrouve ligoté à un pilier du Cabaret
Hucheloup. Enjolras lui annonce qu'il sera fusillé à la minute où la
barricade tombera. Gavroche hérite du fusil du policier. Marius est de
faction Rue Mondétour. 54 insurgés défendent la barricade.
Vers
minuit, un pas cadencé résonne aux environs du Quartier Saint-Merri.
Louis-Philippe vient de lancer ses 38ème, 55ème et 66ème Régiments
d'Infanterie de Ligne sur l'insurrection. Il s'agit d'abord de tester la
résistance des barricades. Dans l'obscurité, un coup de force, ça peut
passer. Pas une torche, obscurité totale sous un orage nocturne de début
d'été. Les officiers lisent l'Avis d’Éviction demandant aux insurgés de
se disperser. Devant le refus manifeste, ils lisent dans la foulée
l'Acte d’Émeute, prévenant de l'assaut imminent. Puis, l'infanterie se
met en ligne de tir, lâche deux décharges et avance. Les insurgés
résistent à ce premier assaut, qui ne vise qu'à éprouver les défenses.
Quelques barricades mineures sont enlevées au pas de charge mais les
plus grosses tiennent. Le Quartier Saint-Merri ne tombera pas. Cet
assaut coût plus cher aux défenseurs qu'aux assaillants. Les insurgés
gaspillent de précieuses cartouches, tirées de trop loin, alors que les
francs-tireurs de la Ligne abattent beaucoup de défenseurs révélés par
leurs tirs. De sorte que dans la nuit du 5 au 6 Juin, bien que les
positions restent inchangées, les insurgés ont subi plus de pertes que
l'Autorité.
Sur
la barricade du Café de Corinthe, le 55ème de Ligne ouvre le feu une
première fois. Le drapeau rouge chute en dehors du mur. Qui pour le
relever ? Un vieil homme se lève, le marguiller Mabeuf, pacifiste réduit à la misère par le régime.
Il replace le drapeau et apostrophe la Ligne : "Vive la République !".
La deuxième décharge de la Ligne l'abat. Les insurgés l'allonge
pieusement sur une table du Cabaret Hucheloup et font de son manteau un
étendard qu'ils arborent sur la barricade, causant la fureur de la Ligne
qui prend l'habit pour un drapeau noir. L'assaut est donné, furieux, et
manque d'emporter la barricade dont 14 défenseurs sont tués. La riposte
arrive tardivement, bien qu'efficacement. Les soldats sont déjà en haut
du mur, mais ils hésitent un peu trop. Un corps-)-corps sanglant
s'engage. Gavroche, pourtant tenu à l'écart par Enjolras, est mis en
joue par un soldat, le couche en joue et tire... en vain. Javert n'avait
pas chargé sont fusil. De son côté, Courfeyrac (qui tient l'aile
gauche) est en passe de perdre un combat face à un sous-officier. Deux
coups de pistolet claquent, abattant les adversaires de Gavroche et de
Courfeyrac. Marius PONTMERCY vient d'entrer dans la lutte. Mis en joue à
son tour, il est sauvé par Éponine THÉNARDIER (déguisée en ouvrier) qui
se jette devant le fusil du soldat et reçoit le coup à la place de
Marius. PONTMERCY s'empare d'un baril de poudre dans le cabaret et
menace de faire sauter la barricade. La Ligne recule, la barricade est
sauvée. Jean PROUVAIRE a été fait prisonnier. Les insurgés l'entendent
se faire fusiller Rue Saint-Denis.
Éponine,
en mourant dans les bras de Marius, lui dévoile que Cosette lui a écrit
et lui donne son adresse. Marius charge alors Gavroche (tentant de fait
de l'éloigner de la barricade) de porter une lettre Rue de l'Homme armé
(juste au nord du Quartier Saint-Merri...). L'enfant remplit sa mission
à moitié. Au numéro 7, il tombe non pas sur Cosette mais sur Jean
VALJEAN, récemment au courant de l'aventure de sa fille adoptive.
Gavroche remet la lettre au bonhomme et s'en retourne vers la Rue
Mondétour, chapardant au passage une charrette pour la barricade,
véhicule qu'il sera obligé d'abandonner pour échapper à des Gardes
nationaux Rue de la Verrerie. Jean VALJEAN ouvre la
lettre de Marius, revêt son uniforme de la Garde nationale (comme tout
bourgeois qui se respecte) et se dirige à son tour vers les barricades.
Excuse.
Je n'ai pas été très présent ces derniers
jours, pour cause de retour en France et de semaines bien remplies !
Mais je vais me rattraper et tâcher de mettre mes blogues à jour dès
aujourd'hui et avant mon départ en colonie de vacances lundi prochain.
Bonne lecture.
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