Blog d'un historien passionné et d'un Français exilé volontaire au Québec. Vous y trouverez donc : des mini-séries historiques passionnantes, des articles bien faits sur ma vie dans la Belle Province, de virulents posts politiques, des hommages aux grand(e)s hommes et femmes qui nous quittent, le tout séparé par des interludes vidéo amusants, ainsi que quelques uns de mes mauvais poèmes et écrits rédigés mes heures perdues. Son blog jumeau sur http://remiposeidon.skyrock.com.
Mon grand ami Alex, chroniqueur historique hebdomadaire pour la radio-campus de l'Université Laval CHYZ 94.3, m'a invité dans sa chronique afin de parler de mon blog (de ce blog) et de sa mini-série sur le R.M.S. Titanic. Me voilà donc à venir dans les locaux sous-terrains de la radio pour intervenir lors de l'émission "Chéri(e) j'arrive !" et à m'asseoir face à l'un des micros du studio feutré, pour la première fois de mon existence.
À
dire vrai, pour parler franchement, sans couper les cheveux en quatre
ni d'ailleurs emprunter quatre chemins, j'ai envie d'annoncer
succinctement que je ne suis pas super enthousiaste face au résultat.
Alex et Catherine sont à l'aise, moi moins c'est entendu mais quand
même... Je me répète, je ne parle pas vraiment du contenu du blog (nan,
ça c'est voulu, c'est pour piquer la curiosité des gens et les forcer à
venir ^^), et surtout j'avais oublié à quel point JE N'AIME PAS MA VOIX !
Mais bon...
Pour ceux que ça intéresse, c'est là que ça se passe,
merci de me dire si le lien ne marche pas (ça prend Quicktime). La
musique est très actuelle voire avant-gardiste. On aime ou on n'aime
pas. L'émission dure une heure, ceux qui veulent juste entendre mes dix
minutes, placez le curseur à peu près là :
Le naufrage du R.M.S. Titanic,
s'il n'eut pas de conséquences économiques internationales, décapita
néanmoins une bonne partie de la gente masculine de la haute-société et
du patronat américain et britannique. Les successions se firent assez
bien, ce sont les héritiers qui ont dû être contents... La Banque Molson
et la Société Protectrice Canadienne des Animaux (SPCA) ont toutes les
deux perdu leur président. L'inauguration du Château Laurier à Ottawa
(Canada) n'a jamais eu lieu, par respect pour celui qui devait en être
le président d'honneur, Charles Melville HAYS, décédé dans le naufrage.
L'industrie du rail est-américain et est-canadien a également souffert.
Une des affaires les plus retentissantes est celle de ceux qui furent connus comme "les orphelins du Titanic"
: les frères NAVRATIL. Français, trop jeunes pour connaître leur nom de
famille, leur père visiblement décédé et ayant voyagé sous un faux nom,
personne ne les réclame. Recueillis par une Américaine francophone et
une passionnée de la France, ils sont photographiés et la photo part sur
le premier bateau en direction de la France pour être publiée dans tous
les journaux. Remarquez les prénoms sur la photo... "Louis et Lola ?"
Le point d'interrogation est éloquent. C'est un garçon et pourtant... Le
fait est que Michel (l'aîné) était presque tout le temps appelé "Lolo",
son surnom, qui est devenu "Louis". Le cadet, Edmond, était surnommé
"Momo", ce qui prononcé par un enfant de quatre ans, avec un bon accent
franco-italien du sud de la France de 1912 a dû sonner dans les oreilles
américaines comme "Lola"... L'autre photographie est également
éloquente, et ma foi assez triste. Remarquez les jouets que tiennent les
bambins. La petite automobile miniature que tient le petit Edmond dans
sa main (à gauche) et le modèle réduit de bateau (le Titanic...) entre les jambes de Michel (à droite). Ces deux jouets étaient des gracieusetés de la White Star Line aux enfants de Seconde Classe du Titanic
et ont été offerts par le 5ème officier "junior" LOWE aux deux garçons à
leur embarquement à Southampton. Leur père a pris soin de leur donner
avant de les emmener au canot D, mais c'est tout ce qu'ils ont sauvé du
naufrage... Les photographies paraissent dans les journaux en France, et
Marcelle NAVRATIL, leur mère, tombe dessus en lisant le Figaro du Dimanche 21 Avril 1912. La White Star Line lui offre un aller-retour sur le R.M.S. Oceanic et la famille se trouve réunie dix jours après le drame.
La
famille SPEDDEN, rescapée, se fera connaître bien plus tard. Daisy
SPEDDEN écrira en 1913 pour son fils Douglas un conte mettant en scène
son ours en peluche, Polar. Conte aujourd'hui édité sous le nom de "Polar, l'ours du Titanic"
(1994). Le manuscrit a été retrouvé en 1982 seulement. Douglas SPEDDEN
est mort à l'âge de dix ans, en 1915, renversé par une camionnette alors
qu'il courait après une balle. N'ayant eu qu'un seul enfant, ses
parents conservèrent sa chambre comme un sanctuaire jusqu'à leur mort,
Polar trônant sur le lit, avant de finir dans la même malle que le
manuscrit, au grenier, après le décès des parents. En 1983, le cousin
qui avait rouvert la malle, après avoir lu le conte, demanda l'ouverture
du caveau familial dans le Maine (États-Unis) et alla déposer la
peluche dans le cercueil blanc du petit Douglas, où l'enfant et son ours
reposent encore aujourd'hui, désormais unis comme autrefois.
En
2002, le bébé inconnu enterré à Halifax est exhumé pour procéder à des tests
génétiques, sans grand espoir. Pourtant, grâce à des descendants, il
est identifié. Il fait en effet partie d'une des familles "connues" de
la Troisième Classe, les GOODWIN, la famille nombreuse en photo dans l'article sur la Troisième Classe, bien qu'il soit absent du cliché (pris en 1909) faute d'être déjà né ! Il s'agit du petit Sidney Leslie GOODWIN (1910-1912).
Beaucoup
de passagers de Seconde Classe demandèrent le remboursement de leurs
biens ou de leur billet, rarement les deux (après tout, ils étaient
arrivés en Amérique, ce qu'ils voulaient), mais la plupart s'arrangèrent
avec les assurances sauf pour les objets à valeur sentimentale. Les
Troisième Classe se firent oublier assez vite, ils avaient atteint le
continent américain, une nouvelle vie commençait pour eux. En revanche,
deux comportements s'opposent en Première Classe. Il y a ceux qui ont
exigé le remboursement de tous leurs biens et de leur billet, jusqu'au
moindre centime et parfois en gonflant les estimations ou en attentant
des procès à la White Star Line. D'autres jouèrent la carte de
l'humilité et ne demandèrent qu'un remboursement symbolique ou pour des
choses particulières. William Ernest CARTER, déjà bien aise pour avoir
survécu en étant un homme, ne demanda que le remboursement de ses deux
chiens restés sur le navire et d'un tiers de sa Renault 1912, les
autres deux-tiers étant couverts par son assurance.
Margaret
BROWN fonda une société regroupant les survivants afin d'aider au
remboursement des plus démunis et de rendre hommage aux victimes.
Elle-même ne demanda que le remboursement du quart de son billet qu'elle
versa à la Cunard puisqu'après tout c'est avec cette compagnie
qu'elle avait fini la traversée. Le milliardaire Archibald GRACIE fut
un membre actif de son association mais ne se remit jamais du naufrage.
Perché avec LIGHTOLLER sur le radeau B, il a passé une partie de la nuit
dans l'eau. Il commence à réunir des témoignages dans le but d'écrire
un livre sur le naufrage mais est gêné dans ses travaux par les maladies
à répétition. Il passe de coups de froid en maux pulmonaires sans
jamais véritablement guérir malgré l'action de nombreux médecins. Une
pneumonie l'emporte finalement le 4 Décembre 1912, il avait 53 ans. Son
livre sortira à titre posthume en 1913, "Rescapé du Titanic".
Charles
LIGHTOLLER demande sa mutation dans la marine militaire, où il finit
par commander un navire, et publie ses mémoires au début des années 1930
afin de se renflouer financièrement. À sa retraite, il achète et
restaure un yacht, le Sundowner, avec lequel il "racheta une partie des vies perdues sur le Titanic".
En Juin 1940, âgé de 66 ans, il répond à l'appel de la Royal Navy pour
aider à l'évacuation des militaires britanniques encerclés par les
Allemands à Dunkerque. Il en sauve 130. À la fin des années 1940, il
rencontra plusieurs historiens pour livrer d'ultimes témoignage sur la
catastrophe, notamment John Walter LORD Junior (1917-2002). Il meurt en
1952. Les autres officiers du Titanic restèrent dans la marine marchande... et n'obtinrent jamais un commandement.
La carrière du capitaine Stanley LORD, commandant du S.S. Californian,
est brisée. Certes, il n'était pas aussi proche qu'on l'a pensé au
début, ce qu'a reconnu l'enquête britannique. Néanmoins, il aurait pu
porter secours au Titanic dans ses derniers instants. En ne se
montrant pas intrigué par les fusées et en refusant de réveiller le
radio, LORD a commis une grave faute professionnelle. Il est démis de
son commandement, licencié de sa compagnie et cassé de la marine
marchande. Le Californian continue sa carrière. Transport de troupes
pendant la Grande Première Guerre mondiale (1914-1918) est torpillé le 9
Novembre 1915 et coule par 5.000 mètres au fond au large de la Grèce.
Son épave n'a jamais été retrouvée.
La possibilité que le Samson soit le navire mystérieux aperçu par le Californian et le Titanic
n'a été évoqué que lors d'une révision générale des archives des
capitaineries des ports d'Islande en 1924. L'équipage jure ses grands
dieux qu'ils n'ont rien vu. En 1992, la théorie est confirmée.
En
revanche, la carrière du capitaine Sir Arthur Henry ROSTRON prend une
tournure héroïque. Salué partout, fait chevalier, acclamé comme le héros
du Titanic, décoré de la Médaille d'Honneur du Congrès par les
États-Unis, il est l'un des hommes les plus admirés de la marine. Fin
1912, Molly BROWN lui offre, au nom des survivants, une coupe pour le
remercier. La Cunard Line le remercie également en lui donnant des commandements de plus en plus importants, l'apothéose étant le superbe R.M.S. Mauretania,
orgueil de la flotte. Il le commande de 1918 à 1928 et fait honneur à
sa réputation non seulement en conservant le Ruban Bleu mais en
augmentant régulièrement le record. Il prend sa retraite en 1931,
unanimement salué comme le commandant le plus apprécié (et le mieux payé
^^) de l'époque, comme le fut SMITH en son temps.
Le R.M.S. Carpathia
resta sous le feu des projecteurs et l'on se battait pour voyager à son
bord, alors qu'il n'était au départ qu'un vieux paquebot d'immigration.
ROSTRON laissa la coupe de Molly BROWN dans une vitrine sur la
passerelle de commandement. Bien que vieux et pas particulièrement
rapide, son prestige était tel qu'il fut chef de file de tous les
convois auxquels il participa durant la Grande Guerre... Le 15 Juillet
1918, il est torpillé par trois fois et coule en deux heures et demi,
entraînant avec lui la coupe du Titanic. L'épave repose au large de
l'archipel des Sorlingues, entre l'Irlande et l'Angleterre, par 155
mètres de fond. Elle est découverte en 1999 et depuis souvent visitée
toujours avec le plus grand respect. Des objets sont régulièrement
remontés et restaurés mais la coupe n'a pas encore été retrouvée.
La White Star Line
peine à se remettre du naufrage. En plus des sommes abyssales à verser à
l'assurance, du remboursement des passagers, elle doit affronter une
chute des ventes compréhensible et la mise en chantier de sa flotte pour
correspondre aux nouvelles normes. Elle s'en sort pourtant. Le R.M.S. Olympic
(en haut à droite), qui n'attire plus personne, est profondément
modifié, sa coque renforcée, son personnel changé, son nombre de canots
triplé mais HADDOCK en garde le commandement, certain que ça va revenir.
Ca revient en effet, mais après la guerre. L'Olympic a redoré
son blason durant la guerre 14-18, a gagné son surnom de "Vieux Fidèle"
et a suivi une brillante carrière. Pourtant ça avait mal commencé dès sa
mise à l'eau en 1911. En partant de Liverpool pour sa troisième
traversée, il est heurté par le croiseur britannique H.M.S. (His Majesty Ship) Hawk (à droite). Pendant la guerre, le jumeau du Titanic
est peinturluré avec un beau camouflage digne d'une œuvre d'art
(centre-gauche) et sert comme transport de troupes en Atlantique,
transportant parfois jusqu'à 7.000 hommes d'un coup. Chacune de ses
arrivée à Halifax est saluée par un triomphe et il devient l'un des
navires les plus populaires au Canada. Mieux, le 12 Mai 1918, il est
menacé par le sous-marin allemand impérial Unterseeboot U-103 qui tente de le torpiller et de l'achever au canon. Plutôt que de fuir, comme sa vitesse le lui permettait, l'Olympic
fait face à son adversaire et, usant de sa méthode favorite, le coule
en le heurtant. Il reste à ce jour le seul navire marchand désarmé à
avoir coulé un navire de guerre, qui plus est un sous-marin. Il vient
aussi plusieurs fois en aide à des navires en difficulté suite à des
torpillages, qu'importe les risques. Sa gloire est faite. J'ai parlé de
méthode favorite en citant la collision car l'Olympic a toujours eu une fâcheuse tendance à se heurter à d'autres navires... En 1924, c'est avec le S.S. Fort Saint-George.
En 1929, il est secoué par un séisme sous-marin en pleine océan ! Il
termine sa carrière en beauté en éperonnant et en coulant, en 1934, le
bateau-feu LV-117 de l'Île de Nantuket... (en bas à gauche) En 1934, la Cunard et la White Star
fusionnent et dégraissent. Les plus vieux navires sont envoyés à la
casse. Photographie magnifique en haut à gauche. Le dernier départ de
Southampton du R.M.S. Olympic (à gauche) et du R.M.S. Mauretania
(à droite), envoyés à la casse le même jour, en 1937... Sur le quai, un
vieux capitaine de presque 70 ans les regarde partir en pleurant,
Arthur ROSTRON.
La White Star Line a tout de même réussi à mettre à l'eau le Gigantic, troisième jumeau de la Classe Olympic. Renommé Britannic pour faire moins pompeux après le naufrage du Titanic,
il sort des chantiers en 1914, sans inauguration et est immédiatement
réquisitionné pour la guerre. C'est alors le navire le plus sûr de son
temps, sept compartiments étanches, double coque, il est même encore
plus luxueux que le Titanic bien qu'un peu moins grand.
Brièvement transport de troupes, il est transformé en navire hôpital en
1915. Le 12 Novembre 1916, au large de l'île de Kéa, en Grèce, une
explosion interne secoue le H.M.H.S. (His Majesty Hospital Ship) Britannic. Vraisemblablement, il transportait une cargaison de munitions malgré son statut de navire-hôpital... Le R.M.S. Lusitania de la Cunard, torpillé en 1915, était également illégalement chargé de munitions. Manque de bol pour le Lusitania,
la torpille a frappé en plein dans les munitions, provoquant une
deuxième explosion qui a ouvert une brèche gigantesque dans la coque et a
englouti le navire en 18 minutes... Pour le Britannic,
l'explosion (d'origine interne et encore indéterminée) a aussi causé des
dégâts considérables mais il semble à la hauteur de sa réputation
d’insubmersibilité. Il penche mais ne coule pas, ni ne chavire. Le
personnel hospitalier est évacué (heureusement, le navire était à vide)
et le commandant tente d'échouer le navire sur l'île, broyant au passage
une chaloupe et ses 30 occupants qui n'avaient pas pu s'éloigner assez
vite des hélices en marche. Non, ce qui a perdu le Britannic,
c'est qu'en prévision de l'accueil des blessés, le navire était en
pleine aération, tous les hublots ouverts. La gîte a fini par faire
renter l'eau par les hublots, condamnant le navire qui coule par 100
mètres de fond. L'épave sera localisée par le commandant Jacques-Yves
COUSTEAU (1910-1997) en 1975.
L'épave du R.M.S. Titanic,
quant à elle, est retrouvée en 1985 par Robert Duane BALLARD (1942- ).
Toute tentative de renflouement est vaine, déjà parce que c'est
compliqué par la séparation de l'épave en deux, ensuite parce que le Titanic est attaqué par une bactérie, Titanicae Halmonas,
qui ronge l'acier et le transforme en poudre de rouille. Le navire perd
165 kilogrammes par an, d'ici cinquante ans il n'en restera plus grand
chose. La bonne nouvelle, c'est que ça nettoie naturellement le fond des
océans de toutes les cochonneries en métal que les humains ont pu y
mettre, épaves ou déchets.
En 1963 est fondé la Titanic Historical Society qui tente de racheter les souvenirs et les objets remontés du Titanic ou à tout ce qui s'y rapporte.
Dans
les années qui suivent le naufrage, à Halifax (Canada), à Belfast
(Irlande), aux États-Unis et en Angleterre, des stèles, des statues, des
plaques sont bâties pour rendre hommage aux victimes du Titanic.
Aux hommes qui se sont sacrifiés pour les femmes et les enfants, pour
les musiciens de l'orchestre, pour le commandant SMITH, pour les
machinistes...
L'histoire du Titanic
a profondément marqué les esprits. Il reste à ce jour une des plus
grandes catastrophes maritimes de l'histoire, l'une des plus
meurtrières. Bien sûr, il n'atteint pas les dix-mille morts des
paquebots allemands coulés en Mer Baltique en 1945 à la fin de la
guerre. Le nombre de passagers décédés est même battus dès 1914 par le
naufrage de l'Empress of Irland face à Rimouski, au Québec,
dans le fleuve Saint-Laurent. Mais tous ces chiffres rentrent dans les
horreurs de la guerre, et surtout aucun de ces navires n'avait le
prestige d'être le plus grand et le plus beau navire du monde. Témoin de
la fin d'une époque, de la fin d'un monde, le Titanic
passionne toujours autant un siècle plus tard. Il n'y a qu'à voir le
chambardement pour son centenaire et les 2.213 fanatiques qui ont refait
une traversée en suivant ses traces. C'est également le seul navire
pour lequel les sirènes des navires sonnent en hommage chaque fois
qu'ils passent dans la zone du naufrage. James CAMERON y a été pour
beaucoup dans le renouveau de la légende en se croyant obligé de sortir
un chef d’œuvre en 1997, qu'il ressort en 3D maintenant, pour faire
bonne mesure.
"Hymn to the Sea" (1997), James HORNER (1953- ).
Ainsi s'achève ma série historique sur le R.M.S. Titanic.
Jamais je n'ai dû écrire autant et aussi vite. Je ne recommencerai pas
ça tous les ans, même si je suis satisfait de mon travail. J'espère que
vous avez pris autant de plaisir à lire que moi à écrire. Je remercie
encore une fois mes nombreux lecteurs de ces dernières semaines.
ATTENTION
! DEUX PHOTOGRAPHIES (D’ÉPOQUE) DANS CET ARTICLE SONT SUSCEPTIBLES DE
CHOQUER LES ÂMES SENSIBLES ET LES ENFANTS. ELLES MONTRENT EN EFFET
L’ÉQUIPAGE DU MACKAY-BENNETT (DE LOIN) EN TRAIN DE SORTIR UN CORPS DE
L'EAU ET UN CADAVRE (EN ARRIÈRE-PLAN) SUR LE PONT DU NAVIRE.
Immédiatement
après le dénombrement des victimes, une commission d'enquête est
organisée, d'abord aux États-Unis d'Amérique, puis au Royaume-Uni de
Grande-Bretagne. Joseph Bruce ISMAY, les officiers et matelots qualifiés
sont forcés de témoigner, tandis que tous les passagers voulant faire
une déposition sont les bienvenus.
La
commission n'est pas tendre en Amérique, et ce d'autant plus qu'elle
est dirigée par un sénateur incompétent dans les affaires maritimes,
William Alden SMITH (1859-1932), à qui il faudra expliquer plusieurs
fois que la proue c'est l'avant du navire...
Les
Américains se montrent très durs avec Bruce ISMAY, le jugeant
responsable du naufrage et de toutes les vies perdues, alors même que
tous les passagers prennent sa défense. Il faut que le gouvernement
britannique menace l'Amérique d'un incident diplomatique pour éviter un
procès expéditif à ISMAY et le rapatrier en Angleterre.
Une
fois au pays, une nouvelle commission d'enquête, plus sérieuse et plus
clémente, est mise en place. Elle est diligentée par John Charles
BIGHAM, Lord Mersey (1840-1929).
Elle
a plus pour but de comprendre le naufrage et en tirer des leçons plutôt
que de dégager des responsabilités. Bruce ISMAY est blanchi, des
erreurs sont soulignés, mais aucun blâme ne tombe, c'est déjà assez
dramatique comme ça. La construction du bateau n'est pas remise en
question, au contraire elle est saluée. En effet, il est établi qu'à
dommages comparables, un autre navire que le Titanic (l'Olympic ou le Mauretania) aurait coulé deux fois plus vite et aurait probablement chaviré. Le Titanic
a coulé en trois petites heures, ce qui a laissé le temps d'évacuer
correctement les passagers, même s'il aurait été possible d'en sauver
500 de plus si les canots avaient été remplis.
Suite
à la commission d'enquête, des mesures sont prises pour renforcer la
législation maritime sur la sécurité des paquebots. Ces mesures sont
encore en vigueur aujourd'hui.
_Emport de fusées de détresse rouges en plus des fusées de signalement blanches.
_Emport
de canots de sauvetage de manière à ce qu'il y ait 200 places
disponibles de plus que le nombre maximum de passagers pouvant être
transportés par le navire.
_Les
canots de sauvetage devront tous être équipés de mâts à lanterne, de
fusées de détresse vertes, d'un poste de T.S.F. fonctionnant sur
batterie, de couvertures et de rations de survie.
_Les
navires devront être équipés d'une double coque en acier renforcé.
(Cela ne s'applique qu'aux paquebots, pas aux cargos... ceux qui se
souviennent du naufrage du pétrolier Erika fin 1999 se
souviendront ainsi qu'une des causes du naufrage vient du fait qu'il ne
disposait que d'une coque simple... Ca évolue pas vite les
règlements...)
_Internationalisation du signal de détresse "SOS".
Parallèlement, dès le Mercredi 17 Avril 1912, la White Star Line affrète un navire, le C.S. (Cable-Ship) Mackay-Bennett qui part de Halifax pour ramener autant de corps qu'il le pourra.
Il
croise pendant près d'une semaine sur les lieux de la catastrophe et
sort 328 corps de l'eau, dont 116 sont rejetés à la mer faute d'être
transportables tellement ils sont dévorés par les oiseaux de mer.
Parmi
les autres, rares sont ceux à être identifiables, et peu de familles
réclament leurs proches. Sur les 212 corps ramenés, on parvient
néanmoins à reconnaître Isidor STRAUS, mais pas son épouse. Est
également repêché le corps de Michel NAVRATIL, le père. Dans sa poche,
on retrouve son revolver. Il est enterré à Halifax sous le nom marqué
sur son passeport d'emprunt : Louis HOFFMAN. La plaque sera changée à la
demande de son épouse en 1916.
Est
également ramené un petit enfant de deux ans environ, visiblement de
Troisième Classe. Les marins n'ont pas pu se résoudre à le rendre à
l'océan. Il est enterré anonymement, grâce à une cotisation des matelots
(intégralement remboursée par Molly BROWN par après) et sa tombe
(photographie) sert alors de mémorial pour tous les enfants décédés dans
le naufrage. Les corps ramenés sont enterrés au Canada, province de
Nouvelle-Écosse, à Halifax, dans trois cimetières : Fairview Lawn (photographie), Mont des Oliviers et Baron de Hirsch.
Dans la journée du Jeudi 18 Avril 1912, sous une pluie battante, le R.M.S. Carpathia arrive finalement à New York. Sur les quais, une foule immense qui ne sait si elle doit acclamer ou garder le silence. Du R.M.S. Olympic
sont parties les premières nouvelles du naufrage et des rescapés. Mais
la plupart des annonces sont fausses. Il a d'abord été annoncé que le R.M.S. Titanic, en difficulté, était remorqué vers Halifax par son jumeau l'Olympic. Puis, qu'il avait bel et bien coulé mais que le Carpathia, arrivé à la rescousse, avait pu sauver tout le monde. Le radio du Carpathia
rétablit en partie la vérité dans la journée du Mercredi 17 Avril 1912
en publiant une première liste des pertes d'une centaine de noms... dont
certains sont pourtant bien vivants ! Le journal ci-dessous titre "Tout le monde sauvé du Titanic après la collision !".
Bref, c'est une foule un peu anxieuse qui attend sur les quais de la Grosse Pomme et devant le siège de la White Star Line.
Le Carpathia s'arrête une heure devant le quai de la White Star Line pour y déposer les canots du Titanic.
Puis, le vieux paquebot se dirige vers le quai de la Cunard Line
pour y débarquer les rescapés. Le terrible verdict tombe. Ils sont peu,
si peu... Ici, Harold BRIDE, le radio survivant, débarque. Il a les
jambes gelées, n'oublions pas qu'il a passé la nuit dans l'eau sur le
radeau B qui s'était retourné...
Ci-dessous, un petit montage de films d'époque. Dommage, les 3/4 du temps, c'est le R.M.S. Olympic
qui est filmé, à l'exception du chargement des bagages et du départ de
Southampton (près du quai, l'image de loin c'est encore l'Olympic). Même le commandant Edward John SMITH (car c'est bien lui) est filmé sur la passerelle extérieure de l'Olympic. En revanche, c'est bel et bien le R.M.S. Carpathia,
le capitaine Arthur ROSTRON et un survivant du naufrage qui
distribue... des autographes ! Notez le petit mousse qui fait
l'andouille tellement il est content. Remarquez que les jeunes sont plus
à l'aise devant la caméra, question de génération sûrement. SMITH et
ROSTRON sont un peu... figés et mal à l'aise, vous ne trouvez pas ?
Bruce ISMAY se précipite au siège new-yorkais de la White Star Line
et télégraphie officiellement la nouvelle du naufrage ainsi qu'une
première liste des victimes, non exhaustive mais qui dépasse déjà le
nombre des survivants. Deux jours plus tard, la liste est officialisée :
711 survivants, 1.502 morts et disparus (67,8% des 2.213 embarqués).
_Première Classe :
123 morts sur 325 passagers (38,6%). 114 hommes sur 175, 4 femmes sur
144 (dont Bess ALLISON et Ida STRAUS), et un seul enfant sur les six (la
petite Loraine ALLISON).
_Seconde Classe : 167 morts sur 285 passagers (58,6%). 154 hommes sur 168, 13 femmes sur 93, les 24 enfants ont été sauvés.
_Troisième Classe : 536 morts sur 714 passagers (74,8%). 389 hommes sur 464, 91 femmes sur 167, 56 enfants sur 83.
Au total, 826 passagers sur 1.324 (62,2%) ont péri.
_Équipage :
677 membres sur 889 ont trouvé la mort, ce qui en fait la "classe" la
plus touchée avec 76% de décès. Le commandant Edward SMITH (on ne sait
trop s'il est mort sur le navire ou s'il a été précipité à la mer...
certains occupants du canot A jurent l'avoir reconnu en train d'aider un
enfant à nager vers le radeau) et le commandant en second Henry WILDE
(peut-être suicidé) figurent parmi les victimes, mais ce sont surtout
des machinistes, des chauffeurs et l'intégralité du personnel de service
masculin à l'exception notable du boulanger Charles JOUGHIN).
Officiellement, 3 femmes sur les 23 sont mortes, et 674 hommes sur les
866 ont péri. Pas d'enfants évidemment, mais il est à noter que les
garçons d'ascenseurs et garçons de cabines étaient tous âgés de 12 à 17
ans et qu'aucun n'a survécu, ils sont comptés comme des hommes...
Pour achever sur une larme, le "Nearer my God to Thee" ou "Plus près de toi mon Dieu" tel que repris comme musique d'apocalypse dans tous les films.
Bon, ça y'est, le R.M.S. Titanic
a coulé mais la série n'est pas encore finie. Je vais l'achever en
beauté par quelques articles sur ce qui s'est passé après, les
survivants, les enquêtes, etc...
Le premier de ces articles portera sur l'arrivée du R.M.S. Carpathia à New York le Jeudi 18 Avril 1912. Voui voui, il s'agit bien d'un rendez-vous pour le 18 Avril 2012 ! ^^
La mini-série "Titanic",
c'est quelque chose comme 150 heures de travail et de recherches
réparties sur quatre mois (ça fait longtemps que j'y pense), pas loin de
250 pages Word et un immense plaisir. J'ai acquis, je
l'espère, un nouveau lectorat plus nombreux. Mes blogs comptent
plusieurs centaines de vues par semaine et j'espère que ça va continuer.
Si cette série vous a plu, je ne peux que vous conseiller celle sur la
Commune de Paris (1871) et celle sur Pearl Harbor (1941), que vous
trouverez dans les tags ou libellés à droite de mes articles, et
généralisés dans l'onglet "Histoire".
Bien
évidemment, même si mes articles sont écrits à l'avance, il y a
toujours des modifications de dernière minute, souvent nombreuses, d'où
une syntaxe, une grammaire et une orthographe parfois déroutantes,
d'autant que je ne prends pas le temps de me relire, soit parce qu'il
est tard et que je suis fatigué, soit parce que j'ai autre chose à faire
(étant chercheur en Histoire, n'allez pas croire que je ne fais rien de
mes journées, surtout en étude à la maîtrise !)... Aussi, si un mot
vous écorche l’œil, merci de me le dire en commentaire, et je remédierai
à la faute.
Mes
articles vont maintenant s'espacer, c'est que tenir un blog sur un
évènement aussi court qu'un naufrage est particulièrement chronophage et
même un peu stressant. Je vais parler des élections en France, et des
choses de la vie à mesure qu'elles surviennent. Peut-être une nouvelle
série historique bientôt, qui sait ? J'espère que les visiteurs qui ont
trouvé ce blog s'y sont plu et y reviendront régulièrement.
À
mes dizaines de lecteurs, à vous tous qui m'avez suivi sur cette série
ou même avant, qui me suivez encore et qui j'espère me suivrez encore,
je voudrais dire encore une fois :
Je
sais, je ne suis pas créatif... J'avais fait un autre montage mais y'a
eu un bug et j'ai la flemme de tout refaire. Je suis au bureau faute
d'avoir Internet chez moi, il fait 32°C dans la pièce, j'étouffe, je veux sortir !
Tout est terminé. Trois heures après avoir heurté l'iceberg, le R.M.S. Titanic
a sombré au fond de l'Océan Atlantique Nord. Pour ceux qui n'ont pas
coulé avec le navire, il faut maintenant survivre. Les cris des
malheureux tombés à l'eau dans les dernières minutes du naufrage
déchirent la nuit et parviennent jusqu'aux canots, regroupés à quelques
centaines de mètres. À bord du canot n°6, un nouveau débat assez vif
éclate entre Margaret BROWN qui veut retourner sur les lieux et le
barreur Robert HICHENS qui ne veut pas. Une fois de plus, le canot se
range du côté du quartier-maître. Sur le canot n°8, la comtesse de
Rothes fait la même demande auprès du jeune matelot qualifié Thomas
JONES, chargé de la chaloupe. Le jeune homme y accède mais ce sont alors
les passagers du canot qui s'y opposent avec énergie et proposent
plutôt de ramer vers une lumière aperçue au nord, celle du mystérieux
chalutier Samson qui a assisté au naufrage sans le savoir. La
comtesse et le jeune matelot entretiendront une relation épistolaire
régulière durant le reste de leur vie.
Pourtant,
les secours s'organisent. Les canots n°2 et 14 hissent leurs mâts et y
accrochent des lanternes pour être vus. Un arrimage commun est réalisé
entre les canots n°10, 12 et 14. Des passagers sont transférés du canot
n°14 vers le n°12 afin que le 14 puisse retourner sur les lieux et aider
les gens dans l'eau. Le canot n°14 porte alors assistance au canot
pliable A, rempli d'eau jusqu'au banc de nage et dont trois occupants
sont déjà morts d'hypothermie. Les corps sont abandonnés et le radeau
laissé à la dérive. Le n°14 retourne alors porter les occupants du A au
canot n°12 avant de revenir à vide sur les lieux du naufrage, 40 minutes
après la catastrophe. Le mer est à -2°C et le temps de survie dans une
eau à cette température n'excède pas 20 minutes. Lorsqu'il parvient sur
place, le canot n°14 ne peut que constater qu'il arrive trop tard,
naviguant dans un champ de cadavres gelés maintenus à la surface par
leurs gilets de sauvetage (même le moniteur de sport Thomas McCAWLEY est
retrouvé mort juché sur un transat, sans gilet car ça le gênait pour
nager). Il ne peut plus alors que prendre le canot pliable D en remorque
et l'arrimer avec le 12, le 10 et le 4 arrivé entretemps.
Car
de son côté, le canot n°4 est retourné rapidement sur les lieux et est
parvenu à sortir sept personnes de l'eau, dont trois meurent de froid
dans les minutes qui suivent. Il vient ensuite en aide au canot pliable
B, retourné et dont les passagers se tiennent debout en équilibre sur la
coque pour éviter de chavirer. Quelques uns sont déjà morts, dont le
radio Jack PHILLIPS. D'autres sont en bonne santé comme le boulanger
Charles JOUGHIN qui barbote joyeusement dans l'eau, l'alcool lui tenant
chaud... Trois personnes embarque dans la canot n°4 mais l'équilibre
devient trop instable et le radeau est finalement pris en remorque est
arrimé avec les canots 10, 12, D et 14. Quelques personnes montent
encore sur le canot n°12 (alors en surcharge avec 70 personnes) mais le
2nd officier Charles LIGHTOLLER, le radio Harold BRIDE et Archibald
GRACIE restent sur leur coque de noix.
À
peine tout ceci est-il fait qu'une fusée éclate au loin. Il est 3h20.
Puis une autre, encore une autre, encore une. Les veilleurs du S.S. Californian,
au loin, remarquent de nouveaux des fusées mais cela les conforte dans
l'idée qu'il s'étaient faits quelques heures plus tôt, il s'agit d'un
signal de compagnie et le radio n'est toujours pas réveillé. Pour les
rescapés du Titanic, c'est l'espoir qui renaît. Des passagères brûlent
leurs chapeau pour faire des signaux, tout le monde crie et tente de se
faire repérer. Ces fusées sont celles du R.M.S. Carpathia, arrivé une heure trop tard, qui signale son approche. Pourtant, le vieux paquebot de la Cunard Line n'a pas ménagé sa peine. Le capitaine Arthur Henry ROSTRON (1869-1940), apprenant la détresse du Titanic,
n'a pas regardé aux risque pour lui venir en aide. Consignant les
passagers dans leurs cabines, libérant les ponts pour les rescapés, il a
fait couper l'eau chaude et l'électricité afin que "chaque goutte de
vapeur soit utilisée pour avancer plus vite". Soupapes de sécurité
fermées, le vaillant navire prévu pour une vitesse de pointe de 15,5
nœuds pulvérise cette nuit son record de vitesse avec 17,5 nœuds. Tous
les hommes d'équipage étaient sur le pont, armés de jumelles. Précaution
utile, le Carpathia dû a contourner pas moins de huit icebergs
sans ralentir l'allure cette nuit-là. À 3h30, les mâts du navire sont
aperçus par les rescapés.
Le premier canot à atteindre le Carpathia est le Canot n°2, à 4h10, qui a dérivé loin au sud faute de bras à la rame. En revanche, c'est lui qui attiré l'attention du navire en tirant des fusées de détresse vertes.
À
6h00, l'évacuation des autres canots commence. Tous les passagers
montent à bord, les uns après les autres. Le canot n°7 et le canot n°5,
arrimés, arrivent en premier. En descendent notamment deux français,
l'aviateur Pierre MARÉCHAL et son ami Paul CHEVRÉ (1866-1914), le
sculpteur de la statue de Samuel de Champlain et de celle de
François-Xavier GARNEAU à Québec, et qui devait assister à
l'inauguration du Château LAURIER à Ottawa avec Charles Melville HAYS
mort sur le Titanic. Les deux canots sont hissés à bord du navire.
Le
canot n°6 ensuite, où Molly BROWN, seule femme à la rame, se dispute
toujours avec le major Arthur PEUCHEN et Robert HICHENS. Le canot est
hissé à bord.
Le
canot n°3. Juste avant que le canot n'atteigne le Carpathia, un jeune
garçon s'éveille à bord. La famille SPEDDEN y est réfugiée et leur fils
Douglas a dormi pendant tout le naufrage, serrant Polar, son ours en
peluche, dans les bras. Lorsque le petit Douglas, six ans et demi, ouvre
les yeux, voyant la lumière de l'aube, il s'écrie "Regardez le beau
Pôle Nord sans Père Noël dessus !" ce qui fait sourire les rescapés. Le jeune garçon monte ensuite l'échelle de coupée presque sans aide
et est accueilli par le capitaine ROSTRON en personne. Son ours polaire
reste dans le canot et il craint pendant un temps l'avoir perdu, ce qui
ne plaît guère non plus à ses parents car il s'agissait d'une pièce
unique artisanale, articulée et en poil véritable, fabriquée en Allemagne. La peluche est
retrouvée lorsque le canot est hissé sur le navire. En 1913, Daisy
SPEDDEN écrira pour son fils un conte sur le naufrage mettant en scène Polar. Le manuscrit, retrouvé en 1982, n'est publié qu'en 1994 et devient un livre à succès pour enfants : "Polar, l'ours du Titanic".
Douglas SPEDDEN ne vivra pas jusqu'à l'âge adulte. En 1915, âgé de dix
ans, il sera renversé par une automobile près de chez lui.
Les canots n°8, 1 (photo ci-dessous), 10 et 9 arrivent à leur tout et sont hissés à bord.
Le canot n°12 en surcharge est à son tour hissé à bord.
Puis
le canot n°13, où se trouve Lawrence BEESLEY. Celui-ci décèdera en 1967
à 89 ans. À noter une tentative de suicide pour le moins originale...
Demandé comme témoin historique sur le tournage du film "Atlantique, latitude 41°" en 1958, il tente, lors du tournage de la scène du naufrage du Titanic,
de se faire oublier sur la grande maquette coulée pour l'occasion afin
de s'y noyer ! Le canot n°15 arrive juste après. En revanche, seul le
n°13 est hissé sur le Carpathia, le n°15 est laissé à la dérive.
Le
canot n°11, avec Alice CLEAVER et Trevor ALLISON (qui mourra d'une
intoxication alimentaire en 1929, âgé de dix-huit ans) est déchargé est
laissé à la dérive, tandis que le canot n°16 est hissé à bord.
Le canot n°16.
Arrive
alors le canot n°14, prenant en remorque le canot pliable D. Le 14 est
laissé à la dérive tandis que le radeau est hissé sur le bateau. Sur le
canot D, les deux orphelins NAVRATIL sont vite devenus la coqueluche des
femmes à bord, dont une seule parle français. Il apparaît, au dire du
petit Michel, que la mère est à la maison et le père sur le Titanic...
Leur situation est donc connue, mais en revanche les petits ne savent
pas leur nom de famille ! À l'arrivée au Carpathia, Michel (l'aîné) veut
escalader l'échelle de coupée tandis que son frère est hissé par un sac
de toile. Mais l'enfant est trop petit pour l'échelle, au bout de trois
essais, il voyage à son tour dans le sac de toile, ce qu'il trouve très
insultant. À bord Arthur ROSTRON, ayant été mis au courant de la
situation, décore Michel NAVRATIL de la Médaille du Courage, aucun des
deux enfants ne montrant de faiblesse lors même que le désastre s'étale
autour d'eux.
C'est
au tour du radeau C d'être secouru et embarqué. ISMAY en sort, est
reconnu et conduit devant ROSTRON. L'air absent, il répète simplement
"Je suis ISMAY...". Le médecin du bord lui donne un sédatif et lui prête
sa cabine.
Enfin,
le canot n°4 remorquant le radeau B retourné. Les deux canots sont
laissés à la dérive. Le 2nd officier Charles LIGHTOLLER, l'officier le
plus gradé à avoir survécu au naufrage, monte à bord en dernier et
présente ses respects et la situation au capitaine ROSTRON.
Sur le pont du Carpathia,
les rescapés s'organisent. Molly BROWN, gagnant son surnom de
"Insubmersible Molly BROWN", s'occupe d'une bonne part des soins et des
installations... des passagers de Seconde et Troisième Classe !
Les autres navires commencent à arriver. C'est d'abord le vieux S.S. Mount Temple
dont le moteur poussif est néanmoins parvenu à le faire avancer à 14
nœuds. Il arrive vers 6h15. L'évacuation étant déjà en cours, il est
entendu que le Carpathia s'occupe des chaloupes pendant que les
autres navires croiseront sur les lieux du naufrage à la recherche
d'éventuels survivants.
À 7h10, c'est le S.S. Californian, enfin, qui rattrape le Carpathia et lui propose son assistance, ce que ROSTRON décline. Le radio du Californian, Cyril EVANS, réveillé vers 5h30, a finalement intercepté un message du S.S. Frankfurt
annonçant le naufrage. Effrayé, le commandant Stanley LORD ne veut pas
croire qu'il était aussi près et qu'ils n'ont rien fait. Il donne
l'ordre de se diriger vers la dernière position connue du Titanic. Il faut néanmoins près d'une heure et quart pour que le Californian s'extraie du champ de glace qui le cernait. Moins d'une heure après, il est sur les lieux. Il aurait donc pu assister le Titanic dans ses derniers instants et sauver quelques vies supplémentaires...
Entre 7h25 et 8h00, le S.S. Birma et le S.S. Frankfurt
arrivent à leur tour. Mais il n'y a plus d'espoir de retrouver des
survivants. La mer n'est qu'un vaste champ de cadavres flottants, à
demi-gelés. Spectacle sinistre qui hantera longtemps la mémoire des
équipages... À 9h00, les navires reprennent leur route.
Toujours le Lundi 15 Avril 1912, le Carpathia fait donc demi-tour pour revenir à New York déposer les rescapés. Vers 14h30, le télégraphe s'anime. C'est le R.M.S. Olympic, jumeau du Titanic, qui s'apprête à croiser la route du R.M.S. Carpathia
et dont le commandant (le capitaine HADDOCK pour ceux qui l'aurait
oublié) propose d'embarquer les rescapés à son bord afin que le Carpathia puisse poursuivre sa route. Arthur ROSTRON décline l'offre en arguant que les survivants du Titanic ne sont probablement pas psychologiquement en état d'embarquer
sur un paquebot en tous points semblable à celui qui venait de couler
sous leurs pieds. Avis plein de bon sens auquel HADDOCK se range,
infléchissant sa route pour que les deux navires ne se croisent pas,
même de loin...
À
1h20, l'évacuation s'accélère. Partent simultanément le canot n°10 à
bâbord et le canot n°9 à tribord, tous deux de 65 places mais
respectivement chargés de 45 et 34 personnes (LIGHTOLLER refuse toujours
de laisser monter les hommes à bâbord).
À
1h25, mouvement de panique à bâbord. Tout le monde (de toutes les
classes) se presse autour du canot n°12. LIGHTOLLER ne parvient pas à
contenir la foule, par ailleurs en grande partie dirigée là par ISMAY
qui ratisse le plus de monde possible pour évacuer. Quand un homme force
le passage pour embarquer, c'en est trop pour l'officier qui fait
affaler le canot alors qu'il n'y a que 24 personnes à bord. Au même
instant à tribord, un même mouvement de foule se produit autour du canot
n°11, mais qui ne dégénère pas du fait que MURDOCH laisse embarquer
tout le monde un temps soit peu que les femmes et les enfants passent
d'abord. Alice CLEAVER, tenant le petit Trevor ALLISON avec elle,
embarque ainsi, séparée de ses employeurs dans la première confusion.
Finalement, le canot n°11 est affalé au même instant que le canot n°12
mais avec 58 personnes à son bord, presque plein.
À
1h30, c'est le canot n°14 qui est affalé à bâbord. Le mouvement de
foule du n°12 s'étant déplacé d'un bossoir, LIGHTOLLER n'a pas pu suivre
et c'est le 5ème officier "junior" Harold LOWE avec le 6ème officier
"junior" James MOODY qui se chargent de l'embarquement, sans pour autant
se montrer plus clément envers la gente masculine que leur supérieur.
Néanmoins, les deux officiers sont jetés dans le canot. MOODY parvient à
s'extraire mais ne peut empêcher les gens de se jeter dans la chaloupe.
Une femme manque de passer par-dessus bord. MOODY laisse passer une
femme avec un châle... qui se révèle être un homme. Un autre monte en
forçant le passage. MOODY ordonne alors d'affaler, LOWE n'ayant pas
réussi à remonter sur le navire, il prend la direction de la chaloupe.
Durant la descente, des passagers et des passagères sautent du pont
directement dans le canot. LOWE dissuade ceux qui seraient tentés de les
imiter de trois coups de revolver qui vont claquer sur le bossoir
au-dessus de la foule. Fin du mouvement de panique. Le canot n°14 touche
finalement l'eau avec 42 personnes à bord.Aucun passager ne fut tué par balle sur le Titanic, n'en déplaise aux films. À
1h35 à tribord, deux canots sont affalés en même temps. Le n°13 et le
n°15. L'évacuation s'accélérant, de plus en plus de passagers montent
sur le pont et tentent d'atteindre les embarcations. MURDOCH décide de
faire confiance à la galanterie de ces messieurs pour laisser passer ces
dames. Lawrence BEESLEY est invité par une de ses amies à prendre place
de le canot n°13, ce qu'il fait. Ce sont surtout des passagers de
Seconde Classe qui montent à bord des deux canots. Frederick BARRETT, le
chef mécanicien est chargé du canot n°13 et, le jugeant assez rempli
avec 60 personnes, ordonne d'affaler. Moins d'une minute plus tard,
c'est le canot n°15 à pleine charge (65 personnes) qui affale. Cette
simultanéité empressée manque de provoquer un accident. Le canot n°13
peine à se dégager de ses cordages et dérive un peu vers l'arrière...
juste sous le bossoir n°15 en train d'affaler son canot. Il faut toute
l'énergie d'un cri de détresse pour alerter MURDOCH au milieu de la
cohue qui règne sur le pont. Le canot n°15 est arrêté à moins d'un mètre
au-dessus du n°13 qui parvient à se dégager de justesse avant que le
canot n°15 ne touche l'eau. À tribord, tous les canots "Standard" de 65
places sont partis de même que le Canot de Secours de 40 places. À
bâbord, le calme rétabli, l'embarquement du canot n°16 commence en même
temps que celui des n° 13 et 15. LIGHTOLLER se montre toujours aussi
intransigeant, aussi ce sont surtout des femmes de Troisième Classe qui
embarquent. À 1h35, le canot n°16 est affalé avec 40 personnes pour 65
places... La gîte prise par le navire sur bâbord gêne un peu la
descente, la chaloupe racle la coque et doit en être éloignée à coups de
rames.
À
tribord, MURDOCH, ayant chargé tous ses canots, peste un temps sur
ISMAY qui a fait partir le canot n°1 à vide, puis se dirige vers la
proue qui commence à être immergée. En effet, il est temps de tenter
quelque chose avec les canots pliables Engelhardt sur le toit
de la passerelle. D'un type nouveau, le personnel de la White Star Line
n'est pas formé à leur usage. C'est donc en tâtonnant que les officiers,
ISMAY (toujours volontaire malgré les brimades) et quelques passagers
se préparent à les mettre à l'eau. Déjà, il faut le faire descendre sur
le pont. C'est chose faite pour le canot pliable C avec deux avirons en
guise de rail. Le radeau est ensuite bossé comme-on-peut sur le bossoir
du Canot de Secours n°1. En découvrant la bâche et en dépliant les
bords, les marins ont la surprise de trouver quatre passagers de
Troisième Classe qui s'y étaient réfugiés ! Sonnés par la descente un
peu brutale, ils sont néanmoins indemnes et sont mis à contribution pour
manœuvrer le bossoir. Tous les passagers alentours sont de la Troisième
Classe, dont beaucoup d'enfants de moins de 12 ans. Le temps que les
femmes et leurs enfants embarquent, les hommes sont allés s'affairer à
bâbord emmenés par le second WILDE. MURDOCH est pour ainsi dire seul à
la manœuvre avec un marin et ISMAY. Le radeau peut contenir 49
personnes, il est chargé de 42 passagers et hommes d'équipage. Au moment
où la descente commence, le courage (à défaut du sang-froid) de Bruce
ISMAY l'abandonne et il saute dans la chaloupe. Une fois le radeau à
l'eau, le président de la White Star Line prit une rame et tourna le dos au Titanic.
Il pleura durant tout le reste du naufrage, sans jamais plus oser
regarder en arrière. Le canot C fut le dernier mis à la mer correctement
à tribord, tandis que l'eau submerge définitivement la proue,
accélérant de plus en plus l'inondation du navire et son naufrage, tout
en se rapprochant de la passerelle où se trouvent les derniers canots.
Du
côté bâbord, LIGHTOLLER est toujours aussi revêche à laisser monter les
hommes. Pourtant, il ne reste presque plus que ça sur le pont.
Résultat, à 1h45, le Canot de Secours n°2 part sans être guère plus
rempli que son collègue le n°1, avec seulement 18 personnes pour 40
places, dirigé par le 4ème officier "junior" Joseph BOXHALL. C'est alors
qu'on se souvient du canot n°4, toujours suspendu à son bossoir avec 35
passagers à son bord depuis le début de l'évacuation... Il est
finalement affalé à 1h55, une heure après son chargement. C'est alors
que certaines personnes, ne voyant plus aucun canot sur le pont,
décident de tenter leur chance à la nage. Quatre mécaniciens et deux
passagers sautent ainsi à la mer et rejoignent avec succès le canot
n°4 qui est alors le plus proche du Titanic.
Charles
LIGHTOLLER imite ensuite William MURDOCH et tente sa chance avec le
canot pliable D. Usant du même système d'avirons en guise de rail et le
bossant au bossoir n°2, il parvient à le charger correctement, toujours
en ne laissant monter que des femmes et des enfants de Troisième Classe,
et deux enfants de Seconde Classe : Michel et Edmond NAVRATIL, que leur
père a placé aux bons soins des dames à bord tandis qu'il reste sur le
navire. À 2h05, le canot D s'éloigne avec seulement 24 personnes à bord
pour 49 places.
Mais
l'eau monte, toujours plus vite. La proue est totalement sous l'eau, et
la mer s'engouffre ainsi par toutes les ouvertures, créant des remous
dangereux. À 2h10, SMITH relève les opérateurs BRIDE et PHILLIPS de
leurs fonctions. Jack PHILLIPS se permet d'envoyer un dernier message,
résigné, signalant l'arrêt de mort du Titanic aux autres
navires venant à son secours : "Femmes et enfants à bord des chaloupes.
Les derniers instants ne tarderont plus. Priez pour nous.". Sur
le pont, le désespoir gagne les passagers encore sur le navire. Tous
les canots sont partis. Le boulanger Charles JOUGHIN s'illustre.
Passablement imbibé d'alcool (pour se tenir chaud) ingurgité au cours
des nombreux aller-retours entre le pont et sa cabine jusqu'à ce que
cette dernière soit inondée, il jette les transats et les meubles à la
mer, radeaux flottants pour ceux qui veulent tenter leur chance dans les
eaux glacés. Pour l'instant, ils ne sont pas nombreux. Trois de mieux
se jettent à la mer et sont recueillis par le radeau D. Sur le pont, la
plupart des hommes discutent, ayant refusé d'embarquer. John Jacob ASTOR
parvient à faire rire le fumoir en commandant au bar (encore en
service) un whisky sans iceberg. Benjamin GUGGENHEIM quant à lui a
revêtu ses plus beaux atours, a aidé à l'embarquement des canots à
tribord et attend désormais la mort dans le Grand Escalier avec son
secrétaire Victor GIGLIO. Isidor STRAUS et Ida STRAUS sont vus enlacés
sur un transat, Ida ayant refusé de quitter son mari. Une famille en
perdition se mêle à cette sereine résignation. Les ALLISON. Bess ayant
été prise de panique dès l'annonce du naufrage alors que Hudson allait
au nouvelle, elle fut séparée d'Alice CLEAVER et de son fils Trevor dans
la confusion. Alice a pu embarquer sur un canot, mais Bess et Hudson,
ignorant le sort de leur enfant, ont refusé d'embarquer tant qu'ils ne
l'auraient pas retrouvés. Ils se retrouvent donc coincés sur le Titanic avec la petite Loraine.
Sur
le haut de la passerelle, on s'affaire toujours à essayer de bosser les
deux derniers radeaux avant que l'eau ne monte. SMITH est passé donner
ses derniers ordres : "Messieurs, le navire est perdu. Abandonnez le
navire. Chacun pour soi et Dieu pour tous. Mais surtout, soyez
Britanniques !". Le 1er officier MURDOCH parvient malgré tout à bosser à
peu près bien le canot pliable A au bossoir n°1, mais le 2nd officier
LIGHTOLLER a moins de chance car le canot pliable B se retourne. Harold
BRIDE et Jack PHILLIPS, après avoir dû se battre (et probablement tuer)
un chauffeur tentant de leur voler un gilet de sauvetage dans leur
cabine, sont désormais sur le pont. En compagnie d'Archibald GRACIE qui,
bien que gentleman ayant laissé sa place dans les canots, est bien
décidé à tenter sa chance, ils vont aider les officiers avec les
radeaux.
C'est alors que le naufrage s'accélère véritablement. L'eau pénétrant par toutes les ouvertures, le Titanic
prend soudainement une gîte importante sur l'avant-bâbord. L'eau
rejoint les bossoirs. C'est à ce moment qu'un officier se serait suicidé
par balle. Si c'est vrai, ce ne peut être que le commandant en second
Henry WILDE, dernier officier supérieur à être armé et dont on n'ait
plus de nouvelles par après. MURDOCH et le 6ème officier MOODY sont précipités à la mer et donnent leurs
ordres d'en bas. Il faut couper les cordes qui retiennent le canot A au
bossoir, et vite ! C'est fait, péniblement, le radeau est rempli d'eau
jusqu'au banc de nage et 17 personnes parviennent à se hisser à bord et à
s'éloigner du remous causés par le navire. Au passage, on tente de
retrouver William MURDOCH et James MOODY... sans succès, probablement morts noyés aspirés
par le paquebot. Charles LIGHTOLLER a plus de chance. Le canot B n'étant
pas encore bossé, il part à la dérive, ventre à l'air. Les deux
opérateurs radio, le 2nd officier et Archibald GRACIE parviennent à
l'atteindre à la nage, de même que 24 autres personnes qui se tiennent
en équilibre précaire sur ce radeau improvisé.
C'est
le début de la fin pour le Titanic. Il est environ 2h15. Toujours
adossé au gymnase, le vaillant orchestre fait résonner un dernier hymne
alors que la poupe commence à se soulever. Il ne s'agit pas du "Plus près de toi mon Dieu", certes approprié et donc joué dans les films, mais de "Songe d'Automne", pas du tout guilleret celui-là, il est vrai assez proche du "Nearer my God to Thee", et qui salue en quelque sorte la mort du géant des mers. Aucun des membres de l'orchestre ne s'en sortit vivant.
À
2h17, Thomas ANDREWS est vu seul au fumoir, calé dans un fauteuil fixé
au sol derrière une table qui l'est aussi, résigné à couler avec sa
création. À 2h18, dans un claquement strident, les câbles de la première
cheminée lâchent et le conduit de 12 mètres de haut s'affaisse dans la
mer. À 2h19, la verrière de la coupole se brise, laissant entrer l'eau
dans le Grand Escalier. À 2h24,
les lumières clignotent, puis s'éteignent, le naufrage passe de la
lumière à l'ombre, la mer illuminée devient soudain lisse et noire comme
l'ébène.À 2h30, l'eau a dépassé la troisième cheminée et
la poupe est alors surélevée de 11° par rapport à la surface. Les
passagers encore à bord tentent de s'agripper à ce qu'ils peuvent,
réfugiés sur l'arrière du navire.
À
2h33, un craquement se fait entendre. C'est tout. Les passagers ne
voient rien sinon la quatrième cheminée s'affaisser. Seul BRIDE, sur le
canot B, affirme que le navire vient de se briser, ce que dément
LIGHTOLLER et le reste des témoins au grand complet. Pour eux, le Titanic
coule d'un bloc, tout juste a-t-il versé sur bâbord à la fin. Pourtant,
le navire s'est bel et bien coupé en deux derrière la troisième cheminée, mais pas de la façon
spectaculaire vue par CAMERON (photo). En fait, par un effet de
pression/contre-pression, sa partie basse serait restée solidaire
suffisamment longtemps pour mettre la poupe à la verticale sans qu'il y
ait affaissement, qui aurait été vu par les rescapés. La faille se
serait d'ailleurs produite sous l'eau et non pas à plusieurs mètres
au-dessus de la surface. Une fois la poupe à la verticale, la proue se
serait détachée. (vidéo)
À
2h36, la poupe, à son tour, s'enfonce dans les flots, entraînant avec
elle ou précipitant à l'eau les quelques 1.400 personnes encore à bord,
dont les cris déchirent la nuit. À 2h40, l'Union Jack de poupe
disparaît de la surface des flots. Quelques minutes plus tard, après un
voyage de 3.823 mètres à grande vitesse, qui arrache en grande partie
les structures arrières, l'orgueilleux paquebot touche le fond de
l'Océan Atlantique Nord, en deux parties séparées par environ trois
cents mètres.