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samedi 28 janvier 2012

Polémique.

Edit* : Un article du Courriel International de cette semaine, qui conduit vers plein de liens du journal El Pais.

Souvenez-vous. Il y a quelques temps, j'avais écrit un article en hommage à Danielle Émilienne Isabelle GOUZE-MITTERRAND (1924-2011), qui venait de décéder. J'avais notamment souligné son engagement pour les Droits de l'Homme.

En commentaire, je me suis attiré cette réponse foudroyante de mon ami et collègue Tony B. :
"Au fait, tu n'évoques pas son soutien inconditionnel à cet autre grand défenseur des Droits de l'homme nommé Fidel Castro".

Il faisait référence à l'accueil du dictateur cubain par Danielle MITTERRAND en France le 15 Mars 1995.



Je lui répondis alors ceci :
"Je pourrais moi-même dire beaucoup de bien de Fidel Castro, malgré le fait que ce soit un dictateur. Certes, il était temps que le régime mette un peu d'eau dans son vin rouge, mais tout de même. Je ne me suis pas engagé sur ce terrain glissant de peur de choquer certains Cubains de Miami.".

En plus d'un commentaire aiguisé de ce cher Tony B. :
"Oui et puis qu'importent les morts, du moment que ce sont les gentils qui les tuent ?",
je m'attirais illico les foudres d'un autre commentateur régulier de ce blog, Moietpersonnedautre, libre penseur et qui a la qualité de ne pas avoir la langue dans sa poche :
"Bonjour Posséidon
Que c'est magnifique de voir un homme de Gauche si intégre au socialisme même si certains socialistes ont du sang sur les mains! J'aimerai bcp savoir ce que tu aimes chez Fidel Castro. C'est bien un jugement de garçon de salon mondain. Connais tu des gens qui ont vécu sous le régime de Castro? A quel prix était l'ordre et la sécurité chez Castro, et avant chez Staline. Tous ces hommes proches du peuple qui ont détruit autant qu'Hitler ( je ne parle pas de chiffres, de sondages) mais qui ont peu d'idées sur les valeurs humaines. Cela m'étonne vu que tu défends dans ton blog une autre gauche... voire même une Gauche molle. Vois-tu des points en commun entre Hollande et Castro-Staline ? Lesquels ? Je connais des ges qui ont vécu le Stalinisme en tant qu'enfant. Je peux te garantir que les grands penseurs n'étaient pas dans les salons mondains, mais au goulag! ça devait être pareil pour Castro! C'est honteux de se prétendre de Gauche et de dire du bien à des didacteurs qui ont tués ( intellectuellement ou physiquement) des familles entières! Ce sera quoi ton prochain article ? Un hommage au Saint Kadhafi ? hahaha".

Je promettais donc un article de justification, qui a tardé tout simplement parce qu'en Décembre, ma session à l'Université s'est mal terminée, j'en suis sorti vidé physiquement, démoralisé, n'aspirant qu'au repos de mes pauvres neurones pendant quelques temps. Je rentrai donc en France pour les fêtes durant lesquelles je ne fis absolument rien, et bon sang que ça m'a fait du bien. Je répète que j'en avais besoin. Il était donc inutile de me relancer encore et encore, très cher Moietpersonnedautre. M'attaquer comme vous l'avez fait sur mon seul espace de liberté intellectuelle n'a fait que franchement m'agacer, et une demande supplémentaire de votre part aurait conduit à un commentaire saignant vous envoyant proprement ch*** vous, vos idées, votre impatience et votre foutu article sur Castro. Cet article, le voilà. Cela étant, vous êtes prévenu pour le jour où vous voudrez me lancer sur une autre polémique. Faites-le, je n'ai rien contre (je suis même plutôt pour), mais laissez-moi répondre quand et comme je veux, je n'ai pas toujours le temps ou l'envie de me consacrer à mon blog. Je ne vis pas à travers lui, j'ai ma vie et mes études à mener à côté.

Bref, avant de défendre Castro, je vais d'abord me défendre moi, puisque j'ai été directement attaqué dans le commentaire ci-dessus cité.
_Je ne défends pas une Gauche molle. Relisez bien mes articles. Je ne loue les Primaires Socialistes de 2011 que pour leur côté démocratique assez inédit dans l'Hexagone à l'échelle des partis. Sur le fond, le programme socialiste ne m'enthousiasme guère, mes idées se rattachent plus au Front de Gauche, cependant entre la peste marine et le choléra sarkozyste, j'aime autant le rêve hollandais. Et qui sait ? Peut-être à force de virer degré par degré à gauche finira-t-on par mettre la barre à bâbord toute ? On peut toujours y croire, ça n'engage à rien. Mais sinon, sûr que je suis plutôt partisan d'une gauche un peu plus sociale que celle proposée par le Parti Socialiste (P.S.).
_Je suis un intellectuel, je suis un penseur de salon. J'avoue, je vous l'accorde, mais après ? Ca vous va bien de dire ça ! Et je me soigne figurez-vous ! En attendant, je pense comme je veux et ce que je veux, mais je suis toujours prêt à discuter. Pis d'abord, j'ai même pas de salon dans mon 12m² ! ^^ Blague à part, j'ai rencontré des Cubains figurez-vous, même que j'ai eu les deux sons de cloche sur Castro ! Na !
_On peut être de gauche et prendre un peu le parti d'un dictateur, ça arrive même aux gens de droite ! Le régime politique est sans parti, que je sache, il y a des dictateurs et des démocraties des deux bords. J'admire pas mal Napoléon BONAPARTE (1769-1821) aussi, c'est grave cette dérive impérialiste docteur ? Y'a un moment où faut arrêter avec les arguments foireux !
_En parlant d'arguments foireux, la dernière phrase est bien. Mouammar al-Kadhafi (1942-2011) était un fou-furieux, un terroriste, un islamiste non-avoué, un détraqué complètement à côté des réalités socio-économiques de l'Afrique et du monde (sauf en ce qui concerne le pétrole), dont la vocation première était d'embêter le monde, et ça il a réussi... Que ce soit sur le plan idéologique, politique, réalisationnel ou même personnel, ce serait faire insulte à Fidel CASTRO que de les comparer (même s'ils se connaissaient ou se soutenaient l'un et l'autre, j'y reviendrai). Jamais je ne prendrai la défense de ce mégalomane, ne serait-ce que parce qu'il n'y a que moi qui ai le droit d'être mégalo sur cette planète !


Voilà, ça c'est fait. Maintenant, je vais clarifier ma position sur le régime cubain. Car je ne me voile pas la face sur le vrai visage de la République de Cuba.
_Une dictature à peine déguisée d'influence socialiste.
_Des centaines de prisonniers politiques.
_Des dizaines de milliers d'exilés politiques, certains volontairement d'autres non (remarquez que l'exil est toujours préférable à une exécution, c'est déjà pas si mal que ce soit dans les options proposées).
_Un passé sanglant, dans la première décennie du régime qui a décidément pas mal de sang sur les mains (en excluant celui causé par la guerre civile [1956-1959] qui a porté Castro au pouvoir, ne mélangeons pas les contextes : une guerre est une guerre, une épuration est une épuration).
_Des Droits de l'Homme en dents de scie, certains sont très bien défendus, mais la plupart sont bafoués. Mais cette ambiguïté explique les hésitations internationales quant aux dirigeants cubains.
_Une liberté d'expression quasiment inexistante.
_Une population certes alphabétisée à 99,5% mais une éducation assurée par des enseignants formés sur le tas et qui sert surtout d'embrigadement de la population aux idées du régime.
_Une ligne idéologique dure, trop dure sûrement, qui n'a laissé les populations accéder à Internet qu'en 2008 et à la propriété (de sa maison) qu'en 2011. Pour le reste, sur le papier du moins, il s'agit d'un système communiste, et vous avouerais-je que je suis plutôt pour à la condition qu'il soit appliqué raisonnablement et correctement, ce qui est loin d'être le cas à Cuba.
_Une pauvreté latente, qui assure néanmoins le strict minimum vital à chacun, comme tout bon régime communiste, mais qui génère néanmoins des situations délicates, notamment beaucoup de prostitution et de tourisme sexuel (fortement nié par le régime mais bon... on est pas dupe...).
_Une corruption absolument étouffante, et donc un marché noir florissant.
_Des provinces qui ne sont pas traitées équitablement, celles de l'est sont ainsi oubliées volontairement par le pouvoir, au contraire de La Havane et des alentours.


Et j'en oublie sûrement. Pour vous faire une idée, deux liens :
_Un article du périodique "Politique Internationale" de Juin 2006. Le lien m'a été redonné en commentaire par Tony B. mais j'avais déjà lu l'article avant car il avait été repris dans un périodique d'Histoire nord-américain en 2010 et je l'avais lu à cette occasion.
_Un blog d'une Cubaine qui parle de son pays, de sa politique, de tout. Réservé aux hispanophones.


Malgré tout, je suis capable de dire du bien de Fidel Alejandro CASTRO-RUZ (1926- ). Comment ? Pourquoi ?
_Il a eu suffisamment de personnalité pour rassembler autour de sa personne la population cubaine pour chasser le Général Ruben Fulgencio Batista y Zaldivar (1901-1973) qui s'est (pour donner une idée du personnage) réfugié en Espagne Franquiste.
_Durant cette guérilla (1956-1959), c'est lui et bien lui, pas Che Guevara (comme le veut la légende) qui a eu le tact et la diplomatie nécessaire pour unifier tous les syndicats en une révolte commune.
_Durant l'épuration politique qui a suivi la chute de Batista, entre 1959 et 1963, il n'était pas encore officiellement au pouvoir ni même membre du Parti Communiste, même s'il détenait un pouvoir non négligeable. Le gros de la Terreur est à mettre sur le dos du Che, encore une fois, qui a dirigé les tribunaux révolutionnaires, fait fusiller près de 1.500 personnes et mis en place les "Camps de Travail et de Rééducation", qui ont été fermés sur ordre de Castro au milieu des années 1970. Cela étant, il faut avouer que Castro n'a rien fait pour réfréner le Che.
_Enfin si, il a nommé Che Guevara à un poste de Ministre de l’Économie et Directeur de la Banque Nationale, poste où le Che était sûr d'échouer, ce qui donnerait une bonne excuse au gouvernement cubain pour envoyer le bouillant Argentin guériller ailleurs.
_Il s'est tourné vers le Communisme et l'Union des Républiques Socialistes et Soviétiques (U.R.S.S.) par obligation et non par conviction, puisque les États-Unis d'Amérique lui ont coupé les vivres dès 1960.
_Il a honnêtement tenté de mettre en place un régime socialiste, mais que faire quand vos alliés sont si loin et que vous avez comme voisin une superpuissance capitaliste qui vous étouffe par un blocus dès 1962 ? Embargo qui d'ailleurs dure encore aujourd'hui, même s'il s'assouplit, grâce à une parfaite mauvaise foi des États-Unis d'Amérique qui isolent commercialement Cuba d'un côté et qui de l'autre s'offrent ainsi un parfait monopole sur les importations de l'île en médicaments et en vivres, à des prix honteux ? Ah c'est sûr, vu les profits que ça génère, ils peuvent bien se montrer gentils et prévenants envers les exilés cubains ! Tiens, et puisqu'on parle de Cuba, des Droits de l'Homme et des U.S.A., quelqu'un peut me rappeler ce qu'il y a à Guantánamo déjà ?
_Son régime n'est certainement pas un régime soviétique, ça non. Les méthodes employées dans les prisons, à la rigueur. Mais pas au quotidien, faut pas exagérer non plus, oh ! On ne peut décemment pas comparer la République de Cuba à l'U.R.S.S. de Joseph Vissarionovitch DJOUGACHVILI "Staline" (1878-1953) (qui elle-même n'est pas comparable à l'U.R.S.S. de ses successeurs plus souples) ou à la République Populaire Démocratique de Corée du Nord.
_Un homme qui échappe à 637 tentatives d'attentat, dont les deux-tiers fomentées par la Central Intelligence Agency (C.I.A.) mérite quand même un certain respect, une sécurité efficace à ce point et un pareil cul bordé de nouilles, ça ne s'invente pas.
_Le système de santé cubain, qu'il a mis en place, est l'un des plus efficaces au monde, faisant des Cubains ceux qui ont la plus longue espérance de vie en Amérique Latine.
_Il a combattu avec et soutenu l'indépendance des pays du tiers-monde et ce sans racisme aucun (au contraire), notamment en Afrique. La République d'Angola et même la République d'Afrique du Sud post-Apartheid lui doivent beaucoup.
_De par sa position isolée depuis la chute du Bloc de l'Est en 1991, il affiche une opinion franchement anti-américaine (et pour ça, les Américains ne peuvent s'en prendre qu'à eux-mêmes), il est amené à soutenir tous ceux qui subissent le courroux des Américains, même si cela lui fait dire des idioties (notamment sur le Mardi 11 Septembre 2001) ou à côtoyer des dictateurs peu fréquentables (Khadafi et la République Islamique d'Iran, entre autres). C'est un homme de conviction, on ne peut pas lui enlever ça.
_Son projet pour une Amérique Latine socialiste me plaît franchement. Avouons néanmoins que pour qu'il soit mis en place correctement, il serait préférable que ce ne soit pas Castro ou même Hugo Rafael CHAVEZ FRIAS (1954- ), Président de la République Bolivarienne du Venezuela (1999- ), qui s'en occupe. Pour que vraiment l'Amérique Latine devienne un modèle de socialisme démocratique, il faudrait plutôt quelqu'un comme Luiz Inacio LULA da Silva (1945- ) ou sa successeur Dilma Vana ROUSSEF (1947- ), de la République Fédérative du Brésil, où le Socialisme (certes peu écologique, je l'admets volontiers) a fait de grandes choses depuis 2003.
_Je crois Fidel quand il dit qu'il n'a pas la fortune colossale de 900 millions de $US annoncée par des études américaines, même si je ne le crois pas non plus quand il dit qu'il ne gagne que 900 Pesos (40$US) par mois (oh, hein, faut pas me prendre pour un imbécile non plus ^^).
_Il a une jolie barbe.


Voilà pourquoi je suis capable de dire beaucoup de bien de Fidel CASTRO, mais en dire beaucoup de bien ne signifie pas adhérer au régime aveuglément. Je regrette même profondément que Cuba ne soit pas devenu le modèle de démocratie sociale que promettaient les Guérilleros de 1959. Je suis également profondément désolé pour les milliers de Cubains exilés de force. Je répète que c'est le personnage qui me fascine et non le régime. Par ailleurs, on peut conjecturer sur ce que serait devenue Cuba si Batista était resté au pouvoir : soit une dictature militaire qui aurait fait passer Castro & Co pour des enfants de chœur, soit un pays lèche-bottes américaines au peuple complètement exploité par l'ultra-libéralisme et pas plus heureux pour autant voire plus malheureux (à l'image des États-Unis du Mexique), soit les deux.


Et puis il faut arrêter de se voiler la face. C'est bien beau de défendre les Droits de l'Homme d'un côté si c'est pour vendre des armes et acheter du pétrole de l'autre ! Ca nous va bien de donner des leçons, n'empêche qu'on est bien content qu'il y'ait toutes ces dictatures dans le monde, ça fait marcher le commerce à bas prix et en plus on peut faire et défaire des hommes d’État à notre guise, c'est chouette, non ? À ce petit jeu, les États-Unis sont très fort, et la Vème République Française n'est pas en reste (quelque soit le gouvernement au pouvoir d'ailleurs). Je suis curieux de voir la réaction de la France en 2020 quand monsieur Alassane Dramane OUATTARA (1942- ) perdra les élections en République de Côte d'Ivoire...

Alors oui, je suis de gauche et je soutiens un dictateur sans être à fond pour son régime. Paradoxal ? Oui, et fier de l'être. Moi au moins j'assume.

Vous remarquerez également que je casse pas mal de sucre sur le dos du légendaire Ernesto "Che" GUEVARA (1928-1967). Excuse-moi Laura (si elle tombe sur ce blog, elle se reconnaîtra), mais plus j'approfondis mes connaissances sur ce gars, plus j'ai du mal à rentrer dans sa légende de révolutionnaire visionnaire et humaniste. À moi, il me fait plutôt l'effet d'un sanguinaire aventurier, certes communiste convaincu, mais complètement à côté de ses pompes quant à l'application du Communisme dans la réalité du XXème siècle, et même singulièrement dur dans ses guérillas et dans sa façon de "gouverner". On ne me verra jamais avec un T-shirt à son effigie.

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