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lundi 9 mai 2011

8 Mai 1871, l'Ultimatum

Au matin, Paris s'éveille pour trouver, placardé sur tous les murs de la capitale, l'avis suivant.


"PROCLAMATION AUX PARISIENS

     La France, librement consultée par le suffrage universel, a élu un gouvernement qui est le seul légal, le seul qui puisse commander l'obéissance, si le suffrage universel n'est pas un vain mot. Le gouvernement vous a donné les mêmes droit que ceux dont jouissent Lyon, Marseille, Toulouse, Bordeaux, et, à moins de mentir aux principes de l'égalité, vous ne pouvez demander plus de droits que n'en ont toutes les autres villes du territoire.
     En présence de ce gouvernement, la Commune, c'est-à-dire la minorité qui vous opprime et qui ose se couvrir de l'infâme drapeau rouge, a la prétention d'imposer à la France ses volontés. Par ses œuvres, vous pouvez juger du régime qu'elle vous destine. Elle viole les propriétés, emprisonne les citoyens pour en faire des otages, transforme en déserts vos rues et vos places publiques où s'étalait le commerce du monde, suspend le travail dans Paris, le paralyse dans toute la France, arrête la prospérité qui était prête à renaître, retarde l'évacuation du territoire par les Allemands et vous expose à une nouvelle attaque de leur part, qu'ils se déclarent prêts à exécuter sans merci, si nous ne venons pas nous-mêmes comprimer l'insurrection.
     Nous avons écouté toutes les délégations qui nous ont été envoyées, et pas une ne nous a offert une condition qui ne fût l'abaissement de la souveraineté nationale devant la révolte, le sacrifice de toutes les libertés et de tous les intérêts. Nous avons répété à ces délégations que nous laisserions la vie sauve à ceux qui déposeraient les armes, que nous continuerons les subsides aux ouvriers nécessiteux. Nous l'avons promis, nous le promettons encore...
     Le gouvernement qui vous parle aurait désiré que vous puissiez vous affranchir vous-mêmes... Puisque vous ne le pouvez pas, il faut bien qu'il s'en charge, et c'est pour cela qu'il a réuni une armée sous vos murs... Jusqu'ici, il s'est borné à l'attaque des ouvrages extérieurs. Le moment est venu où, pour abréger votre supplice, il doit attaquer l'enceinte elle-même... Il dépend de vous de prévenir les désastres qui sont inséparables d'un assaut. Vous êtes cent fois plus nombreux que les sectaires de la Commune. Réunissez-vous, ouvrez-nous les portes qu'ils ferment à la loi, à l'ordre, à votre prospérité, à celle de la France. Les portes ouvertes, le canon cessera de se faire entendre ; le calme, l'ordre, l'abondance, la paix rentreront dans vos murs ; les Allemands évacueront votre territoire, et les traces de vos maux disparaîtront rapidement.
     Mais si vous n'agissez pas, le gouvernement sera obligé de prendre, pour vous délivrer, les moyens les plus prompts et les plus sûrs. Il le doit à vous, mais il le doit surtout à la France, parce que les maux qui pèsent sur vous pèsent sur elle ; parce que le chômage qui vous ruine s'est étendu à elle et la ruine également... La France veut en finir avec la guerre civile...

Louis-Adolphe Thiers, Président du Conseil de la IIIème République Française, Versailles, 8 Mai 1871."

Ce coup de semonce, qui prélude à l'assaut final de Versailles, fait peur. En conséquence immédiate, Gérardin, Melliet et Pyat démissionnent du Comité de Salut Public, remplacés au pied levé par Charles DELESCLUZE (1809-1871), Émile EUDES (1843-1888) et Charles Ferdinand GAMBON (1820-1887). Louis ROSSEL, Délégué à la Guerre, renforce les garnisons des portes, mais le Comité de Salut Public impose en plus l'interdiction sous peine de mort aux civils de s'en approcher et aux Gardes Nationaux Sédentaires de les garder de nuit, obligeant la Garde Nationale Mobile à disperser ses maigres effectifs, et à tracer une croix sur la sortie prévue pour désenclaver le Fort d'Issy. Il en débouche une très violente dispute à l'Hôtel de Ville, lors de laquelle Rossel enguirlande joliment les membres du Comité qui ne veulent rien entendre.

Le Fort d'Issy est bombardé toute la matinée, et à 13h les Versaillais pénètrent dans les faubourgs du village et s'emparent de l'église, menaçant d'encercler totalement les défenseurs qui, après avoir tiré toutes leurs munitions et détruit leurs dernières pièces d'artillerie, abandonnent définitivement le fort se replient sous les tirs ennemis en direction du village au pied des remparts, sous la protection des canons de Paris.

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