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lundi 7 mars 2011

Jeudi 23 Septembre 2010, étude anthropologique de l'Oktoberfest version québécoise

Faute d'avoir pensé à mon appareil, cet article se passera d'illustrations.

Date fatidique. Annoncée en gros, en gras et en couleur par affiches placardée sur tous les murs de l'Université Laval, elle est enfin arrivée. L'Oktoberfest. Dans la journée, des barna furent tendus sur les platebandes, et le son fut testé... par des choeurs chantant des cantiques ! Mais passons.

En cours jusqu'au 21h20, je ratai l'inauguration. Affamé, je rentrai au pavillon avec la ferme intention de satisfaire aux revendications de mon estomac, et avec vaguement l'intention d'aller étudier de plus près ce genre de rassemblement, auquel j'assiste (très) rarement, en étudiant studieux, probe et sobre. Au café du pavillon, je rencontrai une de mes camarades d'étage, une charmante allemande, bavaroise qui plus est, que j'apprécie ne serait-ce que par son français impeccable et sans accent (moi qui n'ai jamais fait d'allemand, sinon en CE2). Elle tenait à la main une gigantesque pinte en plastique. Devant mon air interrogateur et un suite à "Was its das ?" impeccablement prononcé, elle m'expliqua le fonctionnement global de cette fête. Pour la modique somme de 15$, on vous fournit ce récipient d'un litre, plein de bière, que vous pouvez ensuite garder ad vitam aeternam des fois qu'il vous prenne l'envie d'en descendre une autre... Bien entendu, toute autre consommation est gratuite durant la soirée. En bonne bavaroise, elle s'était bien sûr enfilée sans broncher ce litron d'alcool et tenait encore bien la route. Elle m'assura que, du moins sur le campus, cela ne tournait pas (encore) en beuverie et que c'était l'occasion de connaître du monde. Cependant, sa présence au pavillon si peu de temps après le début de l'évènement et sans avoir cours le lendemain, qu'elle justifia par un "Das its nicht ebensogut wie in München" (que je compris sans qu'elle eut besoin de se fendre d'une traduction) qui en disait long, laissait à penser qu'il y avait baleine sous gravillon.

Je sortis donc, dans le froid nocturne (aux alentours de 10°C.). A propos de froid, je suis agréablement surpris de mon adaptation aux rudes conditions climatiques, étant le seul étranger de ma connaissance à ne pas être ou avoir été malade. Bref. Pour me guider, il n'y avait que suivre une piste amusante. Je rencontrai d'abord Louis-Joseph GOZON Marquis de Montcalm (1712-1759), Norma Jeane MORTENSON dit "Marilyn MONROE" (1926-1962), la Schtroumfette et Caius Iulius Caesar (-101/-100 ; -44) bras dessus-bras dessous en train de chanter des chansons à boire. Puis, un gamin de quinze ans logeant au Pavillon BIERMANS-MORAUD, genre Justin BIEBER (1994- ) en culotte courte, dissimulant sa pinte et rasant les murs, tant pour s'assurer un soutien (car il tanguait sévèrement) que pour échapper à la vue d'éventuels officiers, la loi fédérale canadienne étant impitoyable envers les underage drinkers. Et je croisai encore d'autres gens, certains comme ma fräulein précitée, à savoir relativement sobres ; d'autres qui, s'ils avaient l'air de marcher droit, n'en sentaient pas moins l'alcool à deux mètres. Arrivant sur les platebandes, mon chemin fut coupé par une jeune demoiselle qui, portable à la main, alla sans s'en rendre compte s'écraser dans la haie avant de se relever avec un juron sonore et... de repartir d'où elle venait !

Me voilà enfin sur le lieu même de la fête. Effectivement, l'ambiance était assez calme et bon enfant. Un chanteur de charme façon Tino ROSSI (1907-1983) converti au Rock n'Roll faisait chavirer des cœurs déjà bien soulevés par la bière. Je suis médisant... En réalité, force m'est de reconnaître qu'il y avait beaucoup plus de gens sobres que de cuits. Rechignant à sortir 15$ et n'ayant pas l'intention de consommer, je profitai d'être tout de noir vêtu pour feinter l'entrée du lieu et m'introduire dans la place par des moyens détournés. L'alcool était là, prêt à couler à flots. Cependant, les participants encore peu nombreux n'y touchaient que peu. Je fus amusé de constater la présence d'un manège à sensations fortes du style centrifugeuse. De quoi achever de mettre en révolution des estomacs déjà bien ballonnés... J'amorçai quelques discussions, de ci, de là. Et constatai une différence amusante : les gens sobres ou presque tissaient des liens, faisaient connaissance, les autres un peu plus embièrés parlaient sexe, alcool amour et eau fraîche, boisson euphorisante et fête. C'est alors que je me fis accoster par une charmante donzelle québécoise déjà bien ronde, à la pinte fendue suite à une chute peu avant. Elle me propose un peu de sa bière, ce que j'acceptai avec joie mais modération. Nous nous assîmes, mais à peine mes vieux réflexes domjuanistes prenaient-ils leur marques que la belle éthyl(hic !) s'assoupit et roula sous la table. Par compassion et après m'être assuré qu'il s'agissait bien de sommeil et non de coma éthylique, je l'installai le plus confortablement et sécuritairement (c'est beau, la formation de secouriste...) possible et les laissai, elle et sa pinte toujours fuyante, cuver leur jus de houblon tout en signalant l'incident à un agent de sécurité. Un regard circulaire suffit à me convaincre que la population changeait. Il était 22h, et la foule fêtarde laissait peu à peu la place au uulgus populi alcoolisé. Ayant cours demain à 8h30, je vidai les lieux aussi discrètement que j'y étais entré.

En chemin, j'aperçus de loin et dans la pénombre plusieurs groupes assez nombreux en train de déballer divers entonnoirs et tubes qu'en bon étudiant averti j'identifiai immédiatement au matériel nécessaire à la pratique du Beer Bong. Prudent, je me tins à l'écart de ces Binge drinkers en puissance, de peur d'être pris dans un mouvement de foule aux conséquences imprévisibles... De retour au pavillon, je décidai de noyer ma faim et ma soif dans une galette à l'avoine et un bon coca, tout en discutant avec ma fringuante deutsche freundin toujours au Café Étudiant. Quand soudain, nous fûmes entourés d'un groupe de Yolanda GIGLIOTTI "Dalida" (1933-1987) chantant fort et faux (mais en roulant les "r") Paroles... Paroles... (1972). "Das fängt an" commenta laconique ma vaillante amie d'outre-Rhin. Et de fait, l'ascenseur s'ouvrit et déversa un flot de joyeux fêtards menés par les Dupondt et Bianca CASTAFIORE, qui se dirigèrent en chahutant vers le lieu de perdition que je venais de quitter.

Et me voilà dans ma chambre, rédigeant la fin de cet article, tandis que je constate par la fenêtre ouverte que les voix se font plus fortes que la musique, que les chants sont de plus en plus bêtes et éraillés, et que les rires sont de plus en plus gras. Et pour confirmer cet état de fait, ceux de mon étages qui rentrent (bruyamment) m'ont l'air passablement éméchés. J'ai entendu un bruit de chute, d'autres bruits de nature indéterminée venant des toilettes, et l'un de mes amis québécois étudiant en médecine jurer allègrement tandis qu'il mettait cinq bonnes minutes à ouvrir sa porte. Là-dessus, mon lit me fait de l'œil , et je vais répondre à ses avances afin d'être frais et dispo, sans gueule de bois et les yous en face des treux, les trous en face des yeux, les yeux en face des trous, demain dans l'amphithéâtre 2B du Pavillon Charles de KONINCK, où je gage qu'il n'y aura pas grand monde et où le professeur aura du mal à se faire entendre au milieu des bruits d'acide acétylsalicylique (ah bon, on dit aspirine maintenant ?) en dissolution. Mais dormir au milieu de ce bordel et de ce boucan du vacarme, du chahut et du bazard ambiant, cela ne va pas être de la tarte, Tintin ! (miam)
La nuit risque d'être longue.

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